Intervention de Patrick Vial-Collet

Réunion du mardi 8 juin 2021 à 18h20
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Patrick Vial-Collet, président de la chambre de commerce et d'industrie des îles de Guadeloupe :

Je m'attacherai à la gestion de la pénurie. Je ne doute pas qu'il aurait été possible de mieux la gérer jusqu'ici. Nous verrons ce qu'il en sera à l'avenir.

Les coupures d'eau fréquentes et les variations de pression ont amené les métiers qui le pouvaient à recourir à une solution de stockage de l'eau. Du fait des fuites, plus longtemps un usager ferme l'adduction d'eau, moins il en perd, quitte à la stocker lorsqu'elle lui parvient.

Un hôtel comme ceux que j'exploite consomme à peu près 140 mètres cubes d'eau par jour. Nous stockons donc de l'eau, bien que cela soit interdit, car un hôtel non approvisionné en eau est en principe contraint à une fermeture administrative, faute de pouvoir respecter les normes sanitaires et d'hygiène.

À une époque, nous avons proposé au préfet, pour pallier le manque d'eau, des solutions à même d'alimenter tous les usagers à proximité de la mer, à savoir des usines de dessalement, aussi bien fixes que mobiles, dans ce dernier cas sous forme de container aménagé. Ce projet n'a pas abouti faut de pouvoir garantir que l'eau dessalée soit potable. En réalité, nous avions besoin d'eau, même impropre à la consommation. Une crise ne saurait être plus mal gérée que lorsqu'on écarte ainsi une solution intermédiaire à même d'y faire face au mieux. Voilà pourquoi tant de Guadeloupéens ont constitué des réserves.

Nous avons identifié une fuite qui perdure depuis six ans. Toutes les semaines, nous en alertons les responsables, sans que subsiste la moindre trace de nos communications. Il serait pourtant simple de permettre aux usagers d'indiquer sur une carte les fuites qu'ils repèrent en vue de leur suivi. Or l'eau coule et se perd mais rien n'est fait.

Un arrêté préfectoral publié avant-hier limite l'utilisation de l'eau pour cause de sécheresse. Il est désormais interdit aux particuliers de remplir leur piscine, d'arroser leur jardin ou de laver leur voiture. Or 50 % de la production d'eau se perd dans les canalisations et aucun dispositif de production d'eau alternatif n'est mis en place. Voilà ce que j'appelle de l'attentisme.

Le plus rageant reste qu'il a été interdit à ceux qui voulaient mettre en œuvre une solution de remplacement d'y recourir. Je tiens à votre disposition un courrier du préfet m'informant d'un délai de deux ans au moins avant l'obtention d'une l'autorisation de construire une usine de dessalement.

Seules des solutions à très long terme sont considérées. De l'eau nous est promise d'ici cinq voire dix ans. Personne n'est capable de fournir un calendrier en vue d'un retour à la normale ni, d'ailleurs, de chiffrer le montant des travaux nécessaires, dont l'estimation oscille de 600 millions à 1,5 milliard d'euros.

Personne ne sait en réalité de quoi il est question. Aucun diagnostic sérieux n'a établi la longueur des canalisations à remplacer ni la quantité d'eau que nous payons réellement. Nous ne pourrions avoir connaissance, à la rigueur, que de la différence entre l'eau facturée et l'eau produite.

Je ne m'appesantirai pas sur la facturation, aléatoire, puisque certains compteurs ne fonctionnent pas. À vrai dire, rien ne fonctionne. Je ne sais si un travail sérieux est fourni à ce sujet. J'ai l'impression qu'un temps considérable a été consacré à l'élaboration d'une structure juridique de gestion de l'eau, alors que les problèmes portent sur le montant des travaux et leur financement, un peu comme si un entrepreneur passait des années à hésiter entre une société anonyme (SA) et une société anonyme à responsabilité limitée (SARL) avant de réaliser son projet.

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