Le Syndicat mixte d'eau et d'assainissement de Mayotte (SMEAM), chargé de distribuer l'eau, rassemble les dix-sept communes mahoraises. Le ministre a parlé de décentralisation, mais la réalité est malheureusement celle que je vais exposer. La situation ne date pas de la présente législature : en 2016 déjà, nous avons connu une crise de l'eau telle que l'on nous avait promis l'envoi de tankers pour nous alimenter. Quand le ministre dit que la compétence de production et de distribution de l'eau revient aux collectivités locales, il dit vrai – si ce n'est que l'État a la main et que lorsque les élus locaux mahorais cherchent à prendre des initiatives, l'État les sape et impose sa propre lecture. En est-il ainsi à Mayotte exclusivement ? Je ne sais, mais c'est en tout cas ce qui s'est passé lorsque le SMEAM a proposé le financement et la réalisation d'une usine de dessalement à Petite-Terre avec le concours de l'État.
L'État a imposé que ce marché soit confié, sans appel d'offres, à une entreprise qui se chargeait de fournir à peu près 5 000 mètres cubes d'eau par jour. Cette usine a été payée par avec les fonds européens sans que les travaux soient réalisés ; elle devrait être en fonction depuis deux ans et ne l'est toujours pas. Et lorsque le syndicat a commencé à hausser le ton, la préfecture l'a muselé et a cherché à lui arracher toutes les compétences en lui forçant la main, notamment en transférant la mise en œuvre de ces politiques à la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, qui n'a pas aucune compétence ni juridique ni technique en la matière. D'ailleurs, quand le président de la République est venu à Mayotte, je l'ai interrogé à ce sujet ; on sent une relation si resserrée entre l'État et de grandes entreprises nationales qu'elles sont plus puissantes que l'intérêt des collectivités.
Autre exemple : le SMEAM a demandé que des terres destinées à la construction d'une troisième retenue collinaire soient expropriées ; l'État ayant refusé de déclarer l'utilité publique, on en est toujours au même point. Des sommes importantes sont inscrites et des conventions sont signées pleines de grands mots, mais en réalité tout est verrouillé pour que les choses ne fonctionnent pas, si bien que les problèmes d'eau perdurent. Nous souhaitons que l'État soit notre partenaire, non qu'il prenne la place des élus. La compétence étant transférée, comment faire pour que l'État accepte d'entendre les positions des élus au lieu qu'il les empêche d'agir pour leur reprocher ensuite de ne rien faire ?