Intervention de Catherine Kamowski

Réunion du jeudi 15 juillet 2021 à 14h00
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Kamowski :

Il s'agit d'un rapport extrêmement intéressant, où j'ai retrouvé mon expérience d'élue de terrain, ayant notamment participé aux travaux d'une commission locale d'évaluation des charges transférées (CLECT). J'ai en effet exercé les responsabilités de maire d'une ville dotée d'une régie municipale des eaux avant qu'elle ne transfère en 2005 la compétence à la communauté d'agglomération de Grenoble, devenue métropole. J'étais également vice-présidente de la communauté d'agglomération, chargée des déchets urbains, et j'ai, à ce titre, géré le transfert, qui nous a pris une bonne année ; ce fut extrêmement instructif. Je précise que je n'exerce plus ces mandats locaux, mais je me rends compte à la lecture de vos remarques et de vos propositions, d'ailleurs pertinentes, que les pratiques de la métropole grenobloise relevaient de la bonne gouvernance, ce qui ne semble pas être le cas dans tous les territoires.

Vous avez raison, il faut analyser finement les avantages et les inconvénients des DSP et comparer les différents modes de gestion – régie, DSP, société publique locale (SPL), société d'économie mixte à opération unique (SEMOP), etc. Ce fut le cas à Grenoble lors du renouvellement de la DSP relative à l'incinération des déchets. Il s'agit de questions extrêmement techniques, mais également politiques, au sens noble du terme. Le choix est toujours complexe, les implications, nombreuses, et le travail, très long. Les élus s'appuient sur les services des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et des municipalités ou sur des cabinets recrutés spécialement pour les aider, car ils n'ont pas la science infuse – pour ma part, j'étais professeure d'anglais avant d'être élue, et n'étais pas spécialiste en matière de gestion des déchets.

Prend-on toujours la bonne décision ? Nous n'en sommes jamais sûrs, mais c'est à nous de la prendre et de la faire appliquer, car il s'agit bien d'un choix politique – je pense en particulier à la gratuité des premiers mètres cubes d'eau. Au sein de l'agglomération grenobloise – j'en reviens à mon expérience locale car il ne faut pas faire de généralisation hâtive –, nous n'avions pas fait le choix de la gratuité. Je ne sais pas ce que feront les nouveaux élus, mais cela nous avait semblé difficile à mettre en place, le nombre de mètres cubes gratuits assigné à chaque ménage dépendant, entre autres, de sa taille, ce qui entraîne d'importantes lourdeurs administratives et des coûts – pour vérifier les déclarations des ménages, la taille de ces derniers évoluant très régulièrement. Or, l'eau payant l'eau, les coûts induits doivent être répercutés soit sur l'usager, soit sur le contribuable.

Avec M. Vuilletet – qui me prie de l'excuser d'avoir quitté la salle car il devait assister à une autre réunion –, nous prendrons le temps de vous transmettre notre contribution par écrit.

Je reviens sur la notion de responsabilité des élus. Représentants du peuple, ils doivent se montrer dignes de la confiance qui leur a été accordée. Ils doivent donc prendre leurs décisions en connaissance de cause et en affronter les conséquences si jamais elles ne sont pas bonnes, la sanction ultime étant la non-réélection.

C'est pourquoi je suis d'accord avec vous : même si l'élu fait confiance à un délégataire de service public, il doit mettre en place des processus de contrôle idoines ou embaucher des personnels qualifiés pour exercer ce contrôle. Dans tous les cas – régie ou DSP –, un rapport annuel doit être présenté à l'assemblée délibérante compétente et publié, comme le prévoit la loi. Il faut rappeler ces exigences de contrôle et de transparence, voire prévoir des sanctions si elles ne sont pas respectées. Ce n'est qu'à ce prix que nos concitoyens retrouveront peut-être confiance en leurs élus. Je me réfère ici aux propositions nos 37 à 43, ainsi qu'à la proposition n° 56, qui sont d'ordre législatif ou réglementaire, et de niveau national ou local.

Je ne suis pas favorable à la codécision avec les usagers, mais la discussion est évidemment nécessaire en amont avec les différentes parties prenantes de la politique de l'eau, notamment dans le cadre des CCSPL.

Il me semble que le plan de relance finance l'eau et l'assainissement à hauteur de 2 milliards d'euros. Vous avez raison, ce n'est pas suffisant car il faudrait déjà 1 milliard pour la Guyane. Au sein de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, Véronique Louwagie et moi allons bientôt remettre notre deuxième rapport sur la territorialisation du plan de relance. Nous avons beaucoup échangé avec France relance, dont le site est remarquable. À cette occasion, j'ai sollicité les collectivités de ma circonscription, située en zone de montagne. Nous retrouvons les mêmes problèmes, de bassins versants ou d'investissements non réalisés. Ainsi les collectivités utilisent-elles toujours des tuyaux datant d'après la seconde guerre mondiale, et les fuites sont-elles de plus en plus importantes.

Tant pour la distribution de l'eau que pour l'assainissement, dans l'intérêt collectif, il nous faut peut-être inciter les élus, voire les obliger, à prévoir un plan pluriannuel d'investissement. Cela passe nécessairement par des mesures financières. C'est pourquoi votre proposition de TVA à 5,5 % sur la partie assainissement du coût de l'eau me semble une bonne idée, mais uniquement si des investissements sont votés, programmés, puis engagés. La décision devrait être prise localement – ce sera peut-être possible si le projet de loi 4D ou 3DS est examiné et adopté –, car tout le monde ne peut pas avancer au même rythme, les problématiques n'étant pas les mêmes partout, comme l'illustrent les cas de la Guadeloupe ou de Mayotte.

S'agissant de la proposition n° 66, je ne suis pas sûre qu'on ait besoin de déclencher le plan ORSEC – organisation de la réponse de sécurité civile – en cas de défaillance de la distribution d'eau. Lors des sécheresses, les communes, ou les collectivités compétentes, organisent déjà l'approvisionnement en eau potable.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.