Je précise que notre syndicat n'est pas multicatégoriel ; il représente exclusivement les surveillants.
Tout d'abord, j'ai une pensée pour ceux de nos collègues qui ont été blessés le 5 mars dernier. Cet événement suscite la colère et un sentiment d'échec, car la politique qui a été conduite jusqu'à présent n'a pas pris la véritable mesure des attentes que nous exprimons depuis une dizaine d'années. L'attentat du 5 mars a appelé l'attention sur la problématique des prisons et des surveillants, mais nous avons perdu une année. En effet, les surveillants avaient exprimé la même colère en janvier 2018, après la survenue de faits quasiment identiques. Nous avons alors manifesté durant quinze jours, pour rien : un an après, nous en sommes toujours au même point. Pourtant, des réunions ont été organisées. En mai 2018, nous avons été auditionnés par une commission d'enquête sénatoriale ; notre syndicat avait alors émis des propositions. Des réunions, c'est bien, mais pour quoi faire ? Pour gagner du temps ? À un moment, il va falloir prendre des décisions ! Je sais bien qu'avec la loi pénitentiaire, les règles européennes et les restrictions budgétaires, la révision générale des politiques publiques (RGPP) puis la modernisation de l'action publique (MAP), la priorité est aux économies mais, aujourd'hui, nous sommes dans l'urgence. Nous avons besoin de réponses concrètes, non pas dans six mois, dans un an ou après le prochain événement, mais tout de suite.
Il est certes difficile de prendre des mesures d'urgence en matière de construction de places de prison ou d'amélioration des conditions de travail, mais il est possible d'agir rapidement dans le domaine de la sécurité, en dotant les surveillants des matériels qui leur permettront de se sentir protégés et soutenus, et de faire face aux nouvelles menaces terroristes.
À cet égard, nous sommes dans le flou : un jour, on nous parle du retour des djihadistes sur le territoire national, le lendemain, on nous dit le contraire. S'ils reviennent, ils seront incarcérés. Or, les prisons sont déjà surpeuplées ! On nous a présenté un plan de 80 000 places il y a dix ans ; aujourd'hui, on nous en annonce 7 000 à l'horizon 2027… Il n'y a rien de concret : nos conditions de travail sont toujours aussi mauvaises et nous sommes toujours en sous-effectifs. Ainsi, les collègues d'une maison centrale que je ne nommerai pas m'ont dit : « Ce matin, on est moins six ! » Alors qu'il nous est déjà difficile de gérer la détention actuelle, on nous parle de terroristes, de djihadistes, qu'il faudrait évaluer pendant quatre mois et qu'on regrouperait éventuellement au sein de quartiers réservés aux détenus radicalisés. Mais nous n'avons ni les structures, ni les établissements adéquats.
En résumé, nos conditions de travail sont mauvaises et nous ne sommes pas à l'abri d'un nouvel attentat commis par un détenu radicalisé déterminé. Il faut que nous soyons formés et que les structures soient adaptées… Nous avons fait l'effort de mettre à jour nos propositions de mai 2018 mais, au fond, rien n'a changé, si ce n'est les nouvelles agressions – environ 4 000 par an – et le dernier attentat. N'attendons pas un nouvel attentat pour agir ! Le climat social actuel, on le connaît : avant les surveillants, il y a eu les policiers.
Certes, nous devons nous occuper de réinsertion, mais nous devons avant tout assurer la sécurité. Comment se fait-il qu'un couteau en céramique ait pu entrer en détention ? Comment se fait-il qu'un détenu fiché ait pu bénéficier d'une unité de vie ? Venez voir en détention comment cela se passe. Arrêtons de mener une politique « pro-détenus », car les menaces sont réelles et nous devrons faire face, dans les années qui viennent, à de terribles problèmes.