Intervention de Jean-Marie Vanlerenberghe

Réunion du mardi 25 février 2020 à 17h00
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Jean-Marie Vanlerenberghe, sénateur, rapporteur général de la commission des affaires sociales du Sénat :

Il était membre d'une commission qui était plus large. Nous avons demandé la liste des membres qui avaient participé à cette mission en 2011.

Le chiffre annoncé nous a paru surprenant, le calcul était hâtif. Il s'agit d'une règle de trois sur des chiffres qui paraissaient exagérés. Nous nous sommes donc interrogés sur ces informations. En 2018, nous avons essayé de distinguer la gravité des irrégularités qui avaient été commises et avons réinterrogé les assurés qui étaient concernés par les manquements les plus sérieux. Nous sommes arrivés, de ce fait, à une estimation des dommages financiers beaucoup plus fiable, mais ce contrôle n'avait porté que sur des dossiers créés en 2017 et non pas sur l'ensemble du stock. Il donnait des éléments sur les conséquences des faiblesses actuelles du système, mais non sur les dossiers les plus anciens. Évidemment, entre 2011 et 2018, les procédures appliquées par le SANDIA ont évolué, les données fournies sont davantage contrôlées aujourd'hui.

J'en viens maintenant au contrôle réalisé par le SANDIA et la DCPAF à partir d'un échantillon représentatif établi sur des bases statistiques contrôlées par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).

Le SANDIA est une émanation de la CNAV, qui est chargée des contrôles de l'immatriculation des personnes nées à l'étranger. Quant à la DCPAF, elle contrôle les documents d'identité aux frontières. Sur les 1 575 dossiers de l'échantillon qui ont fait l'objet d'un contrôle, seuls 47 dossiers, c'est-à-dire 3 %, présentaient une anomalie critique, un nombre significatif apparaissant en anomalie mineure ou en indéterminé. Ce classement tient notamment au fait que l'échantillon concernait parfois des dossiers anciens établis à un moment où une seule fiche d'état civil était acceptée pour une inscription. Ces dossiers alors réguliers ont été classés lors du contrôle en anomalie mineure ou en indéterminé, selon les cas. Le résultat des enquêtes individuelles sur les 47 anomalies critiques n'était absolument pas connu. C'est donc sur ce fondement que nous avions indiqué que le risque financier se situait à l'intérieur d'une fourchette assez large de 200 millions à 800 millions d'euros.

Nous avons demandé au SANDIA et aux organismes intéressés, c'est-à-dire la CNAV, mais aussi l'assurance-maladie et la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), d'effectuer un contrôle précis des prestations servies sur ces 47 dossiers, de les régulariser si possible, ou de remonter les dossiers et d'appliquer des sanctions le cas échéant. Il existe un délai légal pour contester les bases fournies au SANDIA, soit un délai de deux fois trois mois, pour remonter les dossiers et aboutir éventuellement à la suppression des prestations. En septembre, 14 dossiers n'avaient pas pu être régularisés sur les 47, ce qui représentait au total 13 546 euros de prestations versées en 2018. Le préjudice financier associé aux fausses immatriculations peut ainsi être évalué à 117 millions d'euros environ, dès lors que l'on considère l'ensemble des dossiers des personnes vivantes immatriculées et nées à l'étranger. En appliquant le même taux d'anomalie aux dossiers indéterminés, le préjudice peut être estimé à 140 millions d'euros. Nous avons essayé de cerner le plus précisément possible la fraude qui était due à ces immatriculations que nous pouvons considérer comme frauduleuses. Il est évident que ces résultats peuvent être biaisés par la présence dans l'échantillon d'un dossier de fraude important. Un gros dossier avait d'ailleurs été éliminé car la caisse d'assurance-maladie l'avait considéré comme étant acceptable finalement.

Nous avons constaté que les contrôles du SANDIA se sont nettement améliorés entre 2011 et 2018. La formation de ses agents a été approfondie tandis que le recours à la dématérialisation s'est développé. Nous avons formulé quelques critiques en raison de certaines difficultés de lisibilité. Les photocopies sont parfois acceptées quand la personne physique se présente au guichet de la caisse ; elles sont alors envoyées au SANDIA. Les documents scannés sont parfois de mauvaise qualité. Il reste de véritables progrès à faire dans ce domaine. Nous l'avons d'ailleurs signalé.

Des progrès très importants ont aussi été réalisés s'agissant du numéro d'identifiant d'attente (NIA), évitant des allers et retours préjudiciables à la rapidité de l'identification. Ce numéro a tardé malheureusement à être généralisé entre les caisses et le SANDIA. Ce dernier renvoyait 7,8 % de dossiers qui lui semblaient suspects vers les caisses et en attendait le retour avant de publier un numéro d'identification au répertoire (NIR). Près d'une dizaine d'années ont été nécessaires à la mise en œuvre du NIA.

Vous aviez aussi posé quelques questions concernant la provenance des dossiers classés en anomalie critique. Ils viennent de pays très divers, dont des pays européens. Néanmoins, la plupart de ces dossiers montrent une prépondérance assez nette de certains pays, avec 11 dossiers du Maroc et 7 de l'Algérie.

Des progrès ont été réalisés par les organismes de sécurité sociale. En effet, il faut désormais apporter la preuve de son identité avec deux documents, un extrait d'acte de naissance ainsi qu'un titre de séjour ou une carte d'identité, ce qui n'était pas le cas en 2011. Un renforcement considérable du contrôle s'est effectué même s'il reste des améliorations à apporter, notamment sur les scanners. S'il est possible de faire des déclarations par internet, en cas de doute, il faut que la personne physique se présente au guichet de la caisse de sécurité sociale sollicitée.

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