Intervention de Kristel Meiffret-Delsanto

Réunion du mercredi 15 juillet 2020 à 14h00
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Kristel Meiffret-Delsanto, maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l'université de Lorraine :

À titre personnel, je pense que ce type de contrôle est nécessaire. La fraude étant par définition dissimulée et du caractère déclaratif des prestations en cause, il faut développer des prérogatives adaptées. Je ne critique donc pas le principe du contrôle, mais le fait qu'il ne fasse l'objet d'aucun encadrement. L'octroi de ces prestations est lié à des situations données, dont il faut pouvoir contrôler la réalité. On peut croiser toutes les fichiers que l'on veut mais, dans le cas d'un concubinage par exemple, si tous les comptes des deux concubins sont parfaitement cloisonnés et leurs situations économiques totalement séparées, seules les enquêtes dites de notoriété permettront de constater ce qu'il en est réellement. Là où le bât blesse, c'est qu'il n'y a pas d'encadrement, ni réglementaire ni législatif. L'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale dispose certes que des agents peuvent procéder à des enquêtes… Mais après ? Un seul article permet d'entrer dans un logement, de le visiter, mais à la seule fin d'en vérifier la conformité et la décence dans le cadre de la délivrance des prestations logement : le contrôle porte surtout sur l'état du bien loué, non sur la situation des occupants.

Lorsque j'ai commencé ma thèse, une circulaire interne, que je n'ai plus jamais retrouvée depuis, donnait la trame d'un encadrement des pratiques. Le manque d'encadrement est patent. Donnons des prérogatives aux agents agréés, assermentés, comme ceux de l'URSSAF ou de la Caisse primaire d'assurance maladie, assortissons-les de garanties, et tout ira bien : c'est juste une question de pédagogie.

Une pratique qui n'est pas encadrée suscite nécessairement de la défiance, dans un sens comme dans l'autre. En commençant ma thèse, j'avais dressé des tableaux de comparaisons entre les prérogatives et les garanties pour chaque type de contrôle des usagers. C'est ainsi que je me suis aperçue de cette évolution « decrescendo » des contrôles sur place. Il faut contrôler, mais avec l'encadrement nécessaire, ne serait-ce que dans l'intérêt de l'organisme : il n'y a pas que des contrôleurs zélés… Tout le monde aurait à y gagner.

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