Intervention de Patrick Chamboredon

Réunion du mercredi 22 juillet 2020 à 11h00
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Patrick Chamboredon, président du conseil national de l'Ordre des infirmiers :

La fraude est aussi une faute déontologique pour les infirmiers, par atteinte au principe de probité, mais notre profession connaît des problèmes spécifiques. Le premier est que, depuis des années, l'Ordre des infirmiers ne parvient pas à obtenir la nomination de magistrats. L'année dernière encore, six postes étaient vacants sur un effectif théorique de douze, et il en manque encore un ; il en va de même pour les assesseurs, notamment ceux que devrait nommer la MSA. Une autre difficulté tient à ce que tous les infirmiers ne sont pas inscrits au tableau de l'Ordre. C'est le cas, selon les derniers chiffres de la CNAM, d'un peu plus de 10 000 infirmiers délivrant des soins en libéral, soit un peu moins de 10 % des 120 000 infirmiers exerçant sous ce régime, alors même que, conventionnellement, on est tenu d'être inscrit à l'Ordre pour pouvoir exercer. On ignore donc de quel diplôme ces gens sont titulaires, et ils perçoivent de l'argent public sans répondre aux exigences de l'exercice de la profession d'infirmier en France. La loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, dite OTSS, en permettant l'exercice mixte, salarié et libéral, amplifiera le problème, la moitié seulement des quelque 700 000 infirmiers hospitaliers étant inscrits au tableau de l'Ordre. Enfin, la question, pendante, de l'entrée des infirmiers inscrits à l'Ordre dans le RPPS devrait être résolue au premier semestre 2021 et c'est heureux.

Pour des raisons que j'ignore, les suspicions de fraude sont pour l'essentiel traitées au pénal, sans que la section des assurances sociales soit saisie, si bien que nous avons le plus grand mal à apprécier quels infirmiers ont une pratique dysfonctionnelle. D'autre part, ceux des infirmiers qui passent devant la section des assurances sociales font valoir en défense que les enquêtes conduisent à demander à des patients si l'infirmier est vraiment passé assurer des soins d'hygiène et s'il a vraiment fait certains actes deux ou trois ans auparavant, observant que la circonspection s'impose quand on fait appel à la mémoire d'une patientèle assez âgée. Sur la forme, disent-ils aussi, la CPAM est à la fois juge et partie, puisqu'elle verse les cotisations mais qu'elle est aussi à la manœuvre en tant qu'assesseur. M. Revel a d'ailleurs rédigé une directive rappelant les règles de bonnes pratiques.

En résumé, les problèmes structurels que nous connaissons, liés à l'histoire de l'Ordre, nous empêchent de dresser l'état des lieux géographique de la fraude, faute de magistrats et d'assesseurs en nombre suffisant.

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