Intervention de Alain Delgutte

Réunion du mercredi 22 juillet 2020 à 11h00
Commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales

Alain Delgutte, membre du conseil national de l'Ordre des pharmaciens représentant la section A pharmaciens titulaires d'officine et chargé de mission exercice professionnel :

Le trafic concerne différents médicaments. J'ai évoqué les opiacés, mais à une époque on notait un trafic d'hormones de croissance et de corticoïdes destiné à certains sportifs et culturistes ; la gendarmerie y a mis un terme et désormais ces gens s'approvisionnent surtout dans les pays étrangers. Actuellement, les pharmaciens d'officine constatent une vague de prescriptions de médicaments anticancéreux émanant d'hôpitaux parisiens. Cela conduit à penser que des ordonnances stockées en des lieux insuffisamment sécurisés sont volées.

Je ne dispose d'aucun chiffre relatif à ce type de trafic ; peut-être la CNAM en a-t-elle, et aussi l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique. Il se dit que les médicaments ainsi détournés partent ensuite à l'étranger, puisqu'en France ils sont dispensés sans que le malade doive les payer. Cela étant, la traçabilité existe puisque ces médicaments ne sont jamais payés directement mais toujours avec une carte Vitale. Tout repose donc sur la diligence des pharmaciens : quand leur est présentée une prescription de médicament anti-cancéreux émanant d'un hôpital, sans interlocuteur précisé, leur vigilance s'aiguise car des alertes aux fausses ordonnances circulent sur les réseaux sociaux, certaines CPAM refusent maintenant de rembourser ces prescriptions frauduleuses, et quand un médicament de plus de 800 euros délivré n'est pas remboursé, le coup est rude.

Les conseillers ordinaux régionaux sensibilisent leurs confrères à ces trafics de médicaments, de même que l'inspection de la pharmacie des agences régionales de santé, qui joue un rôle prépondérant en cette matière. La CNAM a mis au point une procédure assez lourde : un courrier recommandé avec accusé de réception adressé à chaque pharmacien pour signaler que si M. Untel, dont le numéro de sécurité sociale est indiqué, présente une prescription pour tel médicament, le médecin doit être contacté avant la délivrance du produit qui, éventuellement, ne sera pas remboursé.

On pourrait imaginer qu'un blocage s'active lors de l'usage de la carte Vitale, qui renseigne déjà sur l'ouverture des droits des assurés : la consultation de la base de données de la CNAM provoquerait une alerte invitant, dans le respect du règlement général sur la protection des données, à ne pas délivrer certains produits. Plus largement, la dématérialisation de la prescription réglerait radicalement ce type de fraude, comme d'autres. Peut-être le Dr Simon nous indiquera-t-il pourquoi les choses traînent.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.