Intervention de David-Olivier Kaminski

Réunion du lundi 13 septembre 2021 à 11h00
Commission d'enquête chargée de rechercher d'éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans l'affaire dite sarah halimi et de formuler des propositions pour éviter le cas échéant leur renouvellement

David-Olivier Kaminski, avocat à la Cour :

S'agissant de la police, son rôle consiste à intervenir quand des personnes sont en détresse. C'est le principe général de base. Nous sommes confrontés à une exception à ce principe général en raison soit d'une approche humaine de peur, soit d'une absence d'ordres en ce sens. Il vous appartiendra d'élucider cette exception. De mon point de vue, la situation n'a pas été correctement appréhendée. Il est possible que les policiers diligentés sur place aient manqué d'expérience et n'aient pas su jauger la situation. Cependant, il n'est certainement pas simple de jauger une situation quand on entend un individu prononcer des sourates du Coran.

S'agissant de la juge d'instruction, j'avais travaillé avec elle dans de nombreux dossiers auparavant et je la connaissais. Lorsqu'elle œuvrait au service général, je l'ai rencontrée dans des affaires de droit pénal général. C'était une juge d'instruction ferme sur les principes et ferme avec la délinquance. Je n'ai pas compris ce qui s'est passé dans ce dossier. Elle ne m'a pas mal reçu parce que nous nous connaissions. En outre, si tel avait été le cas, je me serais insurgé en tant qu'avocat. Je considère en effet qu'un juge se doit de respecter un avocat, de le recevoir dignement. La charge de juge représente une fonction républicaine. Elle consiste à mettre en état un dossier pénal. Il est donc hors de question de ne pas recevoir un avocat correctement.

Je le répète, je ne sais pas ce qui s'est passé dans ce dossier. Néanmoins, je pense qu'on peut affirmer, sans être ni accablant ni extrémiste, que des actes qui apparaissaient comme pouvant être in fine des actes à décharge n'ont pas été réalisés alors qu'ils auraient pu l'être. Dans une instruction « normale », ils auraient dû l'être et a fortiori dans un dossier révélé publiquement. Cette affaire a fini par faire l'objet d'une médiatisation très importante. Quand la justice est vue sous le viseur des médias, elle doit être encore plus exemplaire. Je pense qu'elle ne l'a pas été sur ces points précis d'équité judiciaire et cela n'est pas dans la normalité, dans le traitement classique d'un dossier.

J'ai évoqué l'émoi national. Les citoyens ne sont pas idiots, ils ont bien perçu les anormalités dans le traitement de ce dossier. Quand la justice est rendue, même quand la justice est dure, la justice est respectée, la justice passe. Les citoyens ont ressenti un sentiment d'une justice non rendue, d'une justice qui n'a pas été juste, d'une justice qui n'a pas cherché la vérité. Or si dans une enceinte judiciaire, on ne cherche pas la vérité ; si dans une enceinte judiciaire, on ne cherche pas la justice avec un grand « J », où la cherche-t-on ? Cette affaire est sortie des rails judiciaires pour avoir un écho médiatique parce que la justice ne rendait pas à ce dossier ce qui devait lui être rendu. Il convient d'y réfléchir.

Il ne m'appartient pas de souligner des dysfonctionnements ou des fautes ; ce rôle vous est dévolu.

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