Intervention de Georges Fenech

Réunion du mercredi 24 novembre 2021 à 11h05
Commission d'enquête chargée de rechercher d'éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans l'affaire dite sarah halimi et de formuler des propositions pour éviter le cas échéant leur renouvellement

Georges Fenech, ancien député, rapporteur du projet de loi devenu loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental :

Je ne suis pas certain d'avoir employé le terme d'incohérence de l'expertise dans cette affaire, auquel cas il est excessif. J'ai constaté comme vous des divergences dans les conclusions. L'un parle d'irresponsabilité pénale totale et l'autre d'altération des facultés intellectuelles partielle. Une contradiction demeure dans les conclusions des deux experts. Pour le Dr Zagury, le fait de s'être intoxiqué ne peut qu'atténuer la responsabilité. Tous sont d'accord sur le diagnostic de bouffée délirante aigüe. Cette contradiction aurait dû se traduire par une décision d'une juridiction du fond.

Nous devrions faire preuve de beaucoup de modestie dans cette matière. Nous ne savons pas véritablement soigner les maladies psychiatriques. Nous savons seulement canaliser, contenir et calmer. J'observe une tendance ces dernières années à psychiatriser le milieu pénitentiaire. Beaucoup d'experts considèrent que la sanction fait partie du traitement. Ils ont conscience que l'individu n'a pas pleinement possession de ses facultés, mais ils estiment que le passage en prison lui permettra de réfléchir à ses actes. Le taux de psychiatrisation en prison est phénoménal et j'irais jusqu'à le qualifier de scandale. Ces individus relèvent davantage des hôpitaux psychiatriques fermés, que ce soient des UMD comme Cadillac ou des UHSP qui existent en nombre plus développé. Dans les services médicaux pénitentiaires régionaux (SMPR), les patients sont seulement calmés par des neuroleptiques, mais ils ne sont pas traités, probablement par manque de moyens. Il faut rester humble, également au niveau du pronostic. Les experts psychiatres ont beaucoup de réticence à émettre des pronostics, car ils engagent leur responsabilité professionnelle, en cas de récidive après la décision d'une mise en liberté conditionnelle par exemple. Je suis partisan d'une observation sur le long terme, pluridisciplinaire, afin de ne pas laisser à un seul expert la lourde responsabilité d'émettre un pronostic sur la dangerosité ou non de l'individu.

Cependant, cette humilité ne doit pas nous faire manquer d'audace à faire avancer ces expertises qui sont souvent au cœur du problème et des difficultés rencontrées par la justice.

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