Intervention de Meyer Habib

Réunion du mercredi 24 novembre 2021 à 19h00
Commission d'enquête chargée de rechercher d'éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans l'affaire dite sarah halimi et de formuler des propositions pour éviter le cas échéant leur renouvellement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMeyer Habib, président :

Merci pour votre propos liminaire. Merci pour les mots que vous avez eus pour la famille et la communauté juive. Je connais votre détermination, puisque j'ai eu le plaisir de vous avoir comme collègue, puis de vous voir en tête à tête à Beauvau sur des questions de sécurité intérieure. Je connais votre détermination, votre engagement, votre talent, votre intelligence, votre connaissance, votre volonté. Cela étant dit, une femme a été tuée.

Dans le déroulé des événements, j'ai relevé quelques inexactitudes. Comment une femme peut-elle subir des actes de torture, des actes de barbarie, pendant une quinzaine de minutes ? Si la première BAC est arrivée à quatre heures vingt-deux, la deuxième équipe de la BAC arrive à quatre heures vingt-cinq et non quatre heures trente. À quatre heures vingt-cinq, ils sont six fonctionnaires de police. L'appel d'urgence au 17 survient à quatre heures trente-sept et non quatre heures trente-neuf, et l'attaque avait démarré depuis cinq ou sept minutes. La procureure, que nous venons d'auditionner, nous déclare qu'elle était informée de ce qui se passait pendant que Mme Halimi était vivante. Plusieurs témoins proposent à la police d'entrer chez eux. Nous sommes allés sur place. Une partie des policiers se trouvaient autour de la cour, d'où il est impossible de ne pas entendre les supplications d'une femme massacrée à poings nus, qui pousse des hurlements terrifiants au début, qui sera défenestrée encore vivante.

Je rappelle que c'est un policier primo-intervenant, avec son chauffeur, qui ont sauvé des centaines de vies au Bataclan en prenant seuls la décision d'intervenir. La doctrine a été changée : Bernard Cazeneuve m'a invité à Beauvau avec l'ensemble des forces de la BRI, du RAID, du GIGN.

Trois policiers sont derrière la porte. L'assassin est en train de faire ses ablutions, ses prières, les sourates du Coran. Cela dure plusieurs minutes. La famille Diarra envoie, par la fenêtre, le vigik et les clés aux primo-intervenants dès leur arrivée. Les policiers sont donc derrière la porte, mais ils n'entrent pas, ils n'utilisent pas les clés. Dans les rapports, il apparaît que la famille Diarra explique clairement qu'ils connaissent Kobili Traoré et qu'il n'est pas armé. Après ses ablutions, l'assassin se rend sur le balcon. Un autre appartement était plus accessible, mais il choisit l'accès le plus périlleux, celui qui mène chez Mme Halimi et force la porte-fenêtre. Nous nous sommes rendus sur place et avons pris des photos de la porte-fenêtre, qui n'était pas ouverte. Une femme, témoin, invite les forces de police à utiliser son appartement pour accéder facilement chez la victime. La police ne le fait pas. La BRI est demandée par la procureure qui sait qu'une femme est en train d'être agressée, mais la BRI ne vient pas. Pendant ce temps, trois policiers, a minima, sont présents et n'interviennent pas.

Selon certaines doctrines, il est possible d'aller au contact, et en particulier celle qui a été changée par M. Bernard Cazeneuve, ancien ministre de l'intérieur et premier ministre. Il est difficile de concevoir qu'une vingtaine de policiers soient présents et attendent une colonne d'assaut et qu'aucune action en faveur de la victime n'ait lieu, face à une personne qui n'est pas armée. Cette information a été connue immédiatement. Je sais ce qu'est une colonne d'assaut, que j'ai vue intervenir Porte de Vincennes, en présence de Manuel Valls, à l'Hpypercacher, pour une prise d'otages par un terroriste armé qui tuait.

Quel que soit le respect que nous portons à notre police – je vis avec des policiers en permanence depuis de longues années, ce sont des hommes extraordinaires qui travaillent dans des conditions parfois difficiles, au péril de leur vie – tout le monde peut faire une erreur : un ministre, un député, un juge… Nous cherchons à améliorer les doctrines d'intervention puisque ce jour-là, à la suite de la mort d'une femme, nous constatons un dysfonctionnement. Quel est votre sentiment ?

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