Intervention de Christophe Dansette

Réunion du mercredi 1er décembre 2021 à 16h00
Commission d'enquête chargée de rechercher d'éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans l'affaire dite sarah halimi et de formuler des propositions pour éviter le cas échéant leur renouvellement

Christophe Dansette, journaliste à France 24 :

Le témoignage que j'ai apporté a été transmis au procureur général de la République dans le cadre de la procédure en révision intentée par Me Melki et Me Bloch, avocats du frère de la victime. Mon enquête est en cours et j'aurais préféré intervenir plus tard dans votre commission. Je suis cependant conscient que votre agenda est contraint et j'ai par conséquent accepté d'être auditionné aujourd'hui.

Mon témoignage a été transmis par oral puis par écrit il y a une dizaine de jours. Je suis journaliste à France 24 et je me suis intéressé très tôt à l'affaire Halimi, car j'habitais rue Morand dans le 11e arrondissement de Paris. Une alerte du Parisien évoquant une personne asiatique défenestrée m'a interpellé le 4 avril 2017. J'ai compris la raison pour laquelle j'avais vu des policiers à l'angle de la rue de Vaucouleurs et de la rue de la Fontaine-au-Roi ce matin-là en allant déposer ma fille à la crèche rue du Moulin Joly. Le 5 avril, j'ai été stupéfait de découvrir un communiqué du bureau national de vigilance contre l'antisémitisme (BNVCA), auquel je suis abonné, annonçant « apprendre avec effroi qu'une dame de 66 ans de confession juive a été défenestrée dans la nuit du 3 au 4 avril ». Aujourd'hui encore, je m'interroge sur ce qui a pu rendre possible une telle confusion sur l'identité de la victime dans l'article du Parisien.

La vocation de France 24 n'étant pas de traiter de faits divers, j'ai attendu quelque temps avant de proposer à ma rédaction d'enquêter sur le sujet. J'ai réalisé un reportage pour notre case Focus, proposant des émissions d'environ cinq minutes, au mois de juillet 2017. La prise de parole du Président de la République Emmanuel Macron, lors de la cérémonie du Vél'd'Hiv, a justifié que France 24, chaîne internationale, traite d'un tel sujet. Le journaliste Jean Barrère et moi nous sommes rendus sur place et avons filmé la cour de l'immeuble et le balcon de l'appartement de Mme Sarah Halimi. Nous avons également mené une enquête de voisinage. Nous avons tous deux été étonnés de rencontrer des témoins, des voisins, qui n'avaient jamais été interrogés par la police, alors qu'ils avaient assisté à toute la scène. Ils avaient tout vu ou du moins entendu, car ils s'étaient pour la plupart cachés par crainte de tirs, marqués par les souvenirs de ce qui s'est passé pas très loin de là. Certains d'entre eux avaient aussi enregistré par audio ou vidéo une partie de la scène. Aucun n'a accepté de nous montrer ou de nous confier ces enregistrements. Nous avons rencontré une certaine Mme V., que vous avez auditionnée par la suite. Elle n'avait pas témoigné devant la police et avait refusé de parler devant notre caméra lorsque nous l'avions rencontrée. Nous l'avions convaincue que son témoignage était essentiel et qu'elle devait se rendre au commissariat. Sans nous, elle n'aurait pas été entendue par la police. Le fait que des témoins aussi importants n'aient pas été interrogés par la police nous a fortement interpellés.

Dans le cadre du reportage, nous avons rencontré la famille de la victime, et notamment son frère, M. William Attal, avec qui je suis toujours en contact. J'ai continué à suivre de loin cette affaire et ses rebondissements par intérêt. L'affaire est revenue à moi par hasard cet été. J'ai rencontré un des membres du personnel soignant de l'hôpital Esquirol de Saint-Maurice où M. Kobili Traoré est actuellement hospitalisé. Je souhaite protéger l'identité de cette personne et ne préciserai pas s'il s'agit d'un homme ou d'une femme ni la fonction qu'il ou elle exerce. J'ai souhaité retarder l'audition pour revoir cette personne, à qui j'ai pu parler hier. Voici les propos qu'elle m'a rapportés.

Premièrement, selon cette source, M. Kobili Traoré ne prend pas de traitement. Il n'est pas malade. Selon ma source, c'est un grand simulateur. « Je l'ai déjà vu à l'œuvre », m'a-t-elle dit. Il fume toujours du shit. Il n'en consomme plus vraiment, ou en tout cas moins, au sein de l'unité, mais plutôt lorsqu'il se rend à la cafétéria. Il y a trois jours, ma source a été témoin de manière certaine qu'il avait fumé du shit. En revanche, alors qu'il était soupçonné pendant un temps de dealer au sein de l'hôpital, ma source affirme qu'actuellement il ne deale plus : « le dealer, ce n'est pas lui ».

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