En tant que citoyen, Juif, responsable de la communauté juive, ayant suivi et accompagné les familles dans les drames qui ont précédé ce meurtre, le caractère antisémite me paraissait évident. Nous sommes dans une société où je ne peux être juge, sans qu'une enquête ait été menée. J'ai répété les propos des pouvoirs publics, car je fais confiance à la justice de mon pays. En revanche, il nous a paru très important d'inscrire une forme d'appel à témoins dans le communiqué. En effet, des témoignages apparaissaient sur les réseaux sociaux et il paraissait essentiel de nous les apporter directement. C'est un peu ce que j'ai fait dans la dernière tribune à la suite de la décision de la Cour de cassation. Le communiqué mentionne : « chaque information, chaque témoignage peut être décisif. Tous ceux qui pensent pouvoir contribuer à l'enquête doivent se manifester auprès des enquêteurs et leur délivrer toutes les informations dont ils disposent. » Il était fondamental de dire à la communauté juive en émoi que nous avions rencontré le procureur, même si nous ne pouvions leur annoncer que le procureur avait décidé qu'il s'agissait d'un acte antisémite. Parallèlement, le consistoire s'est porté partie civile, parce que j'ai exprimé à de très nombreuses reprises mon intime conviction que cet acte était antisémite, afin d'entraîner la justice à mener son enquête jusqu'au bout. Ce n'est qu'en septembre que le caractère antisémite a été retenu.
Mon rôle a toujours été à la fois d'exprimer ce que la communauté juive ressent, ce que je ressens dans mon cœur est rarement différent, d'alerter et, modestement, de presser tous les intervenants à pousser l'enquête au maximum, ce qu'ils auraient certainement fait de façon normale et naturelle, pour qualifier correctement cet acte, reconnu plus tard antisémite, dont nous avions l'intime conviction, dès le départ, qu'il l'était.