Intervention de Didier Paris

Réunion du mercredi 15 décembre 2021 à 15h05
Commission d'enquête chargée de rechercher d'éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans l'affaire dite sarah halimi et de formuler des propositions pour éviter le cas échéant leur renouvellement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDidier Paris :

Vous avez raison de nous rappeler les limites, qui s'appliquent à votre audition tout comme à notre commission. C'est d'ailleurs ce qui rend notre tâche délicate : sans instruire à nouveau, nous devons tirer les conséquences des difficultés qui ont pu être rencontrées au cours de l'instruction.

Vous avez également évoqué la récente adoption de la loi relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure, qui traduit les évolutions que vous avez souhaitées en ce domaine.

Je vous poserai deux questions assez techniques, auxquelles vous pourrez répondre plus tard, si vous le souhaitez.

Nous nous trouvons face à une personne qui aurait pu être condamnée devant une juridiction pénale mais qui, du fait de son état psychiatrique sur lequel il n'est pas question de revenir, se trouve, non plus sous main de justice, mais sous l'autorité des psychiatres. La question n'est pas celle de savoir si, aujourd'hui, cette personne fume ou non, mais si elle représente un danger pour la société du fait des risques de récidive. Dans l'état du droit, une personne déclarée pénalement irresponsable relève du code de la santé publique, en particulier de l'article L. 3211-12 qui dispose que le juge des libertés et de la détention peut être saisi, à tout moment, aux fins d'ordonner, à bref délai, la mainlevée immédiate d'une mesure de soins psychiatriques, quelle qu'en soit la forme. D'une certaine manière, cet article traduit la primauté de la liberté individuelle et de la protection individuelle des personnes placées en hôpital psychiatrique, ce qui est légitime. Cependant, lorsque des médecins ordonnent la sortie d'une personne déclarée pénalement irresponsable et, de ce fait, placée sous l'autorité du préfet, serait-il possible que le parquet en soit informé et, le cas échéant, puisse saisir un juge des libertés et de la détention pour ordonner une nouvelle expertise et, éventuellement, maintenir la personne en unité psychiatrique ? Il faut protéger les gens hospitalisés mais aussi la société contre une personne qui, pour une raison qui a pris fin, a été déclarée pénalement irresponsable. Il ne serait pas cohérent, en effet, que du jour au lendemain, celle-ci échappe à tout suivi judiciaire du fait de son passage en unité psychiatrique.

Ma deuxième question concerne l'article 1er de la loi relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure : lorsque le juge d'instruction estime que l'abolition temporaire du discernement de la personne mise en examen résulte au moins partiellement de son fait, il renvoie celle-ci devant la juridiction de jugement compétente qui statue à huis clos. Je salue cette évolution du texte qui répond à notre souci de préserver l'oralité du débat et l'expression de chacun. Les dispositions de cet article, aujourd'hui limitées à la consommation de substances psychoactives dans le dessein de commettre une infraction ou d'en faciliter la commission, pourraient-elles être étendues à tous les cas d'irresponsabilité ? L'irresponsabilité ne serait plus définitivement constatée par une juridiction d'instruction mais par une juridiction de jugement, le cas échéant à huis clos et par une formation réduite, par exemple devant les magistrats professionnels de la cour d'assises.

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