Intervention de Stéphane Noël

Réunion du mercredi 29 janvier 2020 à 15h30
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Stéphane Noël, président du tribunal judiciaire de Paris :

Je ne suis pas en mesure de me prononcer sur les moyens que le ministère de l'intérieur alloue à la police judiciaire pour répondre aux mandats judiciaires qui lui sont donnés, soit sous l'égide du ministère public, soit sous l'égide des juges d'instruction. Ce que je peux dire, c'est qu'il arrive que certaines enquêtes, et plus encore certaines commissions rogatoires, soient retardées parce que les services en charge de l'enquête sont surchargés. Cela peut poser des problèmes et, en l'état, l'autorité judiciaire n'a pas la compétence de procéder à des arbitrages pour donner la priorité à certaines enquêtes ou à certaines investigations : c'est effectivement un sujet important.

Dans le même ordre d'idées, il peut sembler étrange que la direction générale de la gendarmerie nationale, pour sa mission de police judiciaire, et la direction centrale de la police judiciaire, au sein du ministère de l'intérieur, ne soient pas dirigées par des magistrats. Il fut un temps, désormais lointain, où la gendarmerie nationale était dirigée par un magistrat. L'important, c'est que les officiers de police judiciaire, qui exercent sous mandat judiciaire (OPJ), reçoivent une habilitation de la part de l'autorité judiciaire : c'est elle qui contrôle le niveau de compétence et d'engagement des officiers de police judiciaire, et elle peut les sanctionner. Un officier de police judiciaire qui n'est pas compétent ou qui ne fait pas preuve de rigueur dans le traitement de la procédure pénale peut se voir retirer son habilitation.

Pour revenir à la tutelle du ministère de l'intérieur sur l'institution judiciaire dans la conduite des enquêtes et sur le contrôle des actes de procédure pénale pris par les OPJ, je rappellerai que les magistrats instructeurs et les parquetiers regardent cela de très près. C'est d'ailleurs le quotidien aussi bien dans les permanences de parquet que dans la conduite des enquêtes par les juges d'instruction. Il y a des liens très forts entre les magistrats instructeurs et les enquêteurs : ils font équipe dans la conduite des enquêtes. La direction et le contrôle de l'enquête, c'est l'affaire du juge d'instruction, et le travail opérationnel, c'est l'affaire des OPJ. J'ai été juge d'instruction pendant quatre ans : ce travail de directeur d'enquête avec des OPJ était extrêmement précieux et, au quotidien, je ne ressentais pas du tout la hiérarchie administrative du ministère de l'intérieur dans la conduite des enquêtes. Par ailleurs, dans l'exercice de mes fonctions de chef de juridiction, je n'ai jamais entendu un juge d'instruction se plaindre d'interférences susceptibles de porter atteinte au bon déroulement des enquêtes.

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