J'ai connu un peu tous les types d'organisation : la dyarchie, la triarchie au tribunal de Paris, avec en plus un partenariat public-privé qui est venu considérablement compliquer la donne. La dyarchie est une organisation baroque, puisqu'il y a deux pilotes dans l'avion. Pour autant, de manière assez classique, le président suit les questions budgétaires, et le procureur s'assure qu'il n'y a pas de distorsion ; mais c'est plutôt le président qui a la main. Il existe une sorte d'accord tacite entre chefs de juridiction, qui s'entendent assez bien sur une répartition. Je vous dois cependant la vérité ! Quand l'allocation des moyens est insuffisante, quand il y a une pénurie de greffiers, quand il y a une pénurie d'adjoints administratifs, se répartir la misère, c'est lamentable !
J'ai connu une autre organisation au tribunal de Paris, avant son déménagement, qui, à mon sens, était beaucoup plus saine : il existait des moyens alloués au parquet, des moyens alloués au siège, et une réflexion sur ce que pouvaient être les services communs, comme le traitement des frais de justice. Nous évitions ainsi des querelles assez indignes, pour bénéficier qui du nouveau greffier, qui du nouvel adjoint administratif. Nous sommes dans une situation permanente de sous-effectifs. Deux directions de greffe séparées, avec d'une part un directeur de greffe rattaché au procureur de la République, qui gère ses moyens, et d'autre part celui du siège, voilà qui est beaucoup plus digne. Cela autorise une dyarchie beaucoup plus harmonieuse, qui consacre son temps aux vrais sujets.
La difficulté est que les moyens alloués aux juridictions sont insuffisants. Dans la plupart des juridictions, nous sommes confrontés à ces pénibles arbitrages. Faut-il affecter le greffier qui vient d'arriver à la notation des officiers de police judiciaire pour le parquet, ou au service d'accueil du justiciable pour le siège, qui sont deux préoccupations prégnantes ? Dans les deux cas, le recrutement est urgent et nécessaire au bon fonctionnement de l'institution. Quand les moyens sont séparés, chacun gère et arbitre sans querelles quotidiennes. Pour avoir testé les deux systèmes, celui-ci est beaucoup mieux.