Intervention de Jean-Michel Hayat

Réunion du jeudi 6 février 2020 à 8h30
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Jean-Michel Hayat, premier président de la cour d'appel de Paris :

Je vais essayer de vous répondre de la manière la plus claire possible. Nous n'avons pas les moyens suffisants en nombre de juges d'instruction pour traiter la délinquance économique et financière, les problèmes d'environnement ou de santé publique, qui deviennent des problèmes majeurs. Les juges croulent sous les dossiers ; ils ne sont pas suffisamment nombreux pour aller au cœur des sujets et assez rapides pour répondre à l'urgence qui est liée à la manifestation de la vérité. Nous sommes enkystés dans des dossiers que nous n'arrivons pas à traiter, parce que nous ne sommes pas assez nombreux. Cela fait que la justice ne fonctionne pas bien, ce qui forcément remet en cause le fondement même de notre mission, la recherche la vérité et l'affirmation de la justice pour la recherche des responsabilités.

Il existe un secteur pour lequel les moyens ont toujours été alloués en temps et en heure : c'est le terrorisme, très clairement. L'État a été très attentif aux besoins absolument indispensables de la justice parisienne pour traiter les affaires de terrorisme. Nous avons toujours été très écoutés.

Sur le crime organisé, des augmentations très considérables de moyens doivent être opérées pour lutter contre ce qui se passe notamment dans le Sud-Est mais aussi sur l'ensemble du territoire. Il en va de même pour la justice pénale économique et financière et pour les problèmes de santé publique et d'environnement. Le pôle santé publique a actuellement à connaître d'affaires gigantesques par l'ampleur des investigations à effectuer. Sept juges d'instruction au pôle santé publique pour traiter les affaires Lubrizol, Dépakine, les accidents d'avion, le chlordécone, etc., voilà qui est très notoirement insuffisant ! Le fait que des juges d'instruction n'arrivent pas à accomplir leur mission sur des sujets essentiels est bien un obstacle à l'indépendance de la justice.

Quand je vois qu'il n'y a pas suffisamment de greffiers pour permettre aux services de fonctionner, que des services correctionnels sont encore trop embouteillés, qu'à Bobigny la situation était telle qu'il fallait onze mois pour pouvoir divorcer devant un juge des affaires familiales, tout cela n'est pas bon et donne l'image d'un service public qui n'accomplit pas sa mission. L'insuffisance des moyens fait obstacle au bon fonctionnement d'un service public.

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