Je ne crois pas que le collège de déontologie se soit prononcé sur des cas mettant en lumière des atteintes à l'indépendance de l'institution ou des interventions intempestives de tiers ou d'autorités publiques.
À l'inverse, des avis portent sur l'impartialité et les exigences de probité et d'intégrité qui s'imposent aux juges administratifs. Par exemple, un magistrat administratif peut-il exercer des activités d'enseignement rémunérées au bénéfice de cabinets d'avocats ? La réponse est non, car cela placerait l'intéressé dans une situation de dépendance vis-à-vis de ce cabinet. La question a aussi été posée – vous allez sourire – de savoir si un rapporteur public pouvait se voir offrir un cadeau en remerciement de ses conclusions. La réponse a été évidemment non. En tant qu'auditeur – j'étais alors tout jeune –, une personne, très satisfaite de mes conclusions, avait souhaité m'abonner pendant un an au Progrès de Lyon. J'ai dû lui faire comprendre que, même si ce journal m'intéressait beaucoup, je ne pouvais bénéficier d'une telle faveur. Nous avons aussi connu le cas d'un conseiller d'État en service extraordinaire qui était le mari d'une ministre en fonction. Le collège a émis un avis sur le point de savoir s'il pouvait exercer les fonctions principales du Conseil d'État. D'autres questions peuvent survenir, comme pour un conseiller d'État qui aurait exercé des fonctions antérieures au sein d'un cabinet ministériel. Sur toutes ces questions, qui portent plus sur l'impartialité que sur l'indépendance, des avis sont rendus et sont publiés sur le site internet du Conseil d'État.
Par symétrie avec la loi du 20 avril 2016 pour les juridictions administratives, la loi organique du 8 août 2016 prévoyait effectivement qu'un certain nombre de juges, à la tête des juridictions judiciaires, devaient, en sus de la déclaration d'intérêts qui s'impose à tous, remplir des déclarations de situation patrimoniale. Cette loi a été déférée au Conseil constitutionnel, qui, dans une décision du 28 juillet 2016, a jugé que le législateur organique, s'agissant de l'obligation qui pesait notamment sur le premier président de la Cour de cassation et sur les présidents de chambre, ne pouvait, sans méconnaître le principe d'égalité devant la loi, réserver l'obligation de déposer une déclaration de situation patrimoniale aux seuls premier président et présidents de chambre de la Cour de cassation, ainsi qu'au procureur général et premiers avocats généraux près la Cour de cassation, aux présidents et procureurs généraux des cours d'appel et présidents de tribunaux judiciaires et procureurs de la République. Du coup, le décret d'application nécessaire à l'application de la loi du 20 avril 2016 sur ce point n'a pas été pris, le Gouvernement ayant considéré que cette décision du Conseil constitutionnel, prise au nom du principe d'égalité devant la loi, valait autant pour les juridictions judicaires que les juridictions administratives. L'obligation n'est pas entrée en vigueur, faute d'un décret qui lui-même se confronte à l'inconstitutionnalité de la loi sur le fondement de laquelle il devait être pris.