Cet effort est à saluer. Cependant, il faudrait séparer plus clairement en affichage politique les moyens dévolus à l'administration pénitentiaire de ceux alloués aux juridictions.
Le juge robot n'existe nulle part. En Europe, l'intelligence artificielle en matière de justice reste peu employée voire pas du tout, si l'on écarte une rumeur concernant un projet estonien de résolution en ligne de petits litiges commerciaux. La Charte éthique fait dialoguer des scientifiques et des juristes, et avance notamment le principe de maîtrise permanente de l'utilisateur. Le juge ne doit jamais être esclave d'un outil devant induire sa décision. La compréhension de la logique ou des biais de raisonnement des logiciels et la critique des logiciels utilisés en matière pénale sont essentielles.
Ce cadre peut évoluer, mais suppose l'existence d'un open data judiciaire : d'une base exhaustive, encodée, de matériaux bruts de jurisprudence permettant de déterminer une moyenne d'allocation de dommages et intérêts par exemple. Nous en sommes loin. Le ministère de la Justice et la Cour de cassation doivent déjà fusionner l'ensemble des données judiciaires des juridictions de première instance et d'appel pour adopter ensuite des logiciels performants susceptibles d'analyser sans biais de raisonnement les données judiciaires brutes et ne pas confondre « causalité » et « corrélation ».
Ce chantier passionnant ne présente pas de danger pour la démocratie. Quand ces algorithmes existeront réellement, auront été testés par des utilisateurs, et auront des juristes parmi leurs concepteurs, nous pourrons avoir une nouvelle approche moins locale de la jurisprudence, des quantums. Cela peut être positif, réduire les aléas et conduire certains à trouver des compromis plutôt que d'aller en justice.