Tout d'abord, nous prêtons le serment d'exercer nos fonctions non seulement avec probité et humanité, mais aussi avec indépendance. Bien entendu, nous avons l'ambition d'être à la hauteur de cette exigence ; mais c'est parfois difficile, surtout en période de crise économique. Ne l'oublions pas, nous avons des rapports d'argent avec ceux que nous défendons. Pardon pour cette trivialité, mais nous faisons tourner une boutique. Or, vous le savez, beaucoup de membres du barreau sont dans une situation précaire. C'est pourquoi nous réclamons des dotations substantielles en faveur de l'aide juridictionnelle, de façon à ce que les avocats soient indemnisés de manière décente. Du reste, des magistrats ont rappelé devant votre commission la dimension budgétaire de l'indépendance.
Si l'avocat est vulnérable, il peut être accessible à certaines séductions. C'est un danger que nous connaissons et auquel nous nous efforçons de résister, individuellement et collectivement, par la formation et, le cas échéant, par la mise en œuvre de procédures disciplinaires. Notre bâtonnier, qui est notre autorité disciplinaire, engage ainsi les procédures qu'il y a lieu d'engager. Ceux de nos confrères qui ont fauté doivent évidemment être défendus, mais nulle complaisance ne saurait être admise, car l'indépendance dépend de l'ensemble des acteurs de la chaîne pénale. Il s'agit donc d'une véritable préoccupation.
Sous cet aspect, la question de l'avocat en entreprise soulève de sacrées questions, dont nous débattons souvent. Autant on est intransigeant, et il le faut, avec des confrères qui se battent sur des terrains compliqués, comme celui du droit des étrangers, que vous avez évoqué, autant on serait prêt à accepter l'atteinte à l'indépendance que représente l'avocat en entreprise. Ce n'est pas fait : la profession a résisté, surtout en province. La déontologie est une véritable préoccupation, et les procédures disciplinaires sont efficaces.