Intervention de Christian Saint-Palais

Réunion du jeudi 28 mai 2020 à 10h00
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Christian Saint-Palais, président de l'Association des avocats pénalistes :

Nous avons en effet publié un communiqué après l'incarcération de l'un de nos confrères pour qui nous avons beaucoup d'estime. À aucun moment, nous ne mettons en cause la légitimité des poursuites ; je ne sais rien de ce dossier. Mais nous nous sommes interrogés publiquement sur le recours à la détention provisoire s'agissant d'un confrère âgé de 70 ans, ancien bâtonnier, qui bénéficie de toutes les garanties de représentation et qui est très respecté pour la qualité de son travail. Par ailleurs, nous nous sommes également interrogés sur la multiplication des perquisitions et la mise en cause d'un des délégués du bâtonnier qui y a assisté. Il faut accepter que l'avocat soit excessif, le cas échéant. Or, en l'espèce, le délégué du bâtonnier est poursuivi pour des propos qu'il a tenus durant une audience, alors qu'il défendait le secret.

À ce propos, monsieur le président, je vous ai entendu dire qu'il faudrait peut-être entourer la perquisition des locaux d'un député de garanties particulières analogues à celles dont bénéficient les avocats. Puis-je me permettre de vous dire que vous vous méprenez en établissant un tel parallèle ? Je souhaite que tous les citoyens bénéficient des meilleures garanties, mais si un délégué du bâtonnier assiste aux perquisitions, c'est pour protéger, non pas l'avocat, mais le secret dont il est le garant. Il doit s'assurer que le juge ne portera pas atteinte aux secrets qui nous ont été confiés. Lorsque nous vous exhortons à modifier la loi qui permet que l'on écoute les conversations, absolument secrètes, que nous avons avec ceux que nous défendons, nous nous plaçons sur le même terrain.

Il faut que nous rappelions aux magistrats, par nos actions collectives, les fonctions que nous assurons. Nous ne sommes pas exempts de reproches ; si les juges estiment qu'il existe, contre un avocat, des indices de participation à des faits répréhensibles, ils doivent le mettre en examen dans le respect des droits de la défense. Mais nous devons veiller à ce que l'on ne se trompe pas, car notre proximité avec ceux que nous défendons, qui est légitime et que nous entendons protéger, peut attiser des convoitises. Nous surveillons donc les perquisitions pour savoir quelle est leur motivation réelle. On peut en effet être tenté de déstabiliser une défense. Quoi qu'il en soit, dans nombre de cas, on se trompe en s'introduisant dans un lieu qui doit être sacralisé comme doivent l'être les conversations que nous avons avec nos clients. Il ne s'agit pas de nous protéger, il s'agit de protéger l'État de droit.

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