Pour le magistrat du parquet que je suis, la distinction que vous faites entre l'obéissance qui serait propre au parquet et l'indépendance qui serait l'apanage des magistrats du siège relève du préjugé et d'une suspicion dont nous devons nous débarrasser. Magistrat du ministère public, je puis vous dire que l'indépendance reconnue par le Conseil constitutionnel pour les magistrats du siège comme pour les magistrats du parquet est une réalité quotidienne. Le parquet est une équipe ; les rapports ne sont pas d'obéissance mais de travail collectif et dans les rapports directs entre un magistrat du parquet et son procureur, il y a souvent plus de liberté de ton que dans les relations plus distanciées entre un magistrat du siège et son président. On se focalise sur l'indépendance juridictionnelle, ce qui est essentiel, mais il ne faut pas oublier l'indépendance du magistrat du parquet dans les décisions qu'il prend tout en étant subordonné hiérarchiquement. La subordination hiérarchique n'est pas l'obéissance ; je m'élève contre cette confusion. D'autre part, l'organisation administrative s'applique aussi bien aux magistrats du parquet qu'aux magistrats du siège. Enfin, vous avez indiqué que certains magistrats du siège estiment qu'il conviendrait de séparer les carrières à un moment donné. Vous observerez, en étudiant la sociologie des auditions que vous avez conduites, que les hauts magistrats du siège ont une analyse différente de ce sujet selon qu'ils sont ou non passés par le parquet. Ceux qui ont occupé les deux fonctions les trouvent extrêmement enrichissantes et sont assez partisans de ces échanges ; ceux qui ne sont pas passés au parquet pensent qu'il faudrait disjoindre les parcours. Je maintiens que l'indépendance est une culture commune aux magistrats du parquet et aux magistrats du siège.