Je commencerai par évoquer quelques éléments de contexte sur le budget de la justice et sur la manière dont nous travaillons, ce qui me permettra de répondre en partie aux questions que vous m'avez envoyées.
Je ne vous décrirai pas tout le budget de la mission Justice. La partie justice judiciaire en est une des composantes, identifiée par un programme propre. Le budget de la justice est divisé en plusieurs programmes : les programmes métier, qui dépendent de l'activité principale du ministère, et les programmes transversaux ou programmes support. Le programme métier dédié à la justice judiciaire représente 2,8 milliards d'euros.
Ces dernières années, le budget de la justice a augmenté plus vite que les crédits du budget général de l'État. Cette hausse observée depuis 1999 s'est accélérée récemment, notamment avec la loi de programmation de la justice, qui en a renforcé les moyens.
À l'intérieur de ce budget, le programme « Justice judiciaire » a également vu ses moyens augmenter sensiblement. Il importe de regarder non seulement les moyens inscrits au budget, mais aussi leur mise en œuvre en gestion. En dehors des dépenses immobilières, sujet emblématique que nous pourrons évoquer par la suite, il n'y a pas de distorsion particulière à constater entre moyens engagés et crédits effectivement dépensés.
Les effectifs ont par ailleurs été renforcés et continuent de l'être dans le cadre de la loi de programmation de la justice ; nous pourrons vous communiquer toutes les séries statistiques si vous le souhaitez. Le niveau de sous-effectif est limité par rapport à la totalité des effectifs.
Vous m'avez interrogé sur la structuration du budget, notamment sur l'opportunité de créer une mission à part. À la direction du budget, nous sommes assez attentifs à ne pas multiplier les missions et à conserver une architecture opérationnelle. Réunir dans une unique mission Justice plusieurs programmes permet à la fois de retracer les crédits et de les suivre en gestion, de s'assurer qu'il n'y a pas de distorsion et de comprendre leur évolution. Toutes les données sont présentes dans les documents budgétaires, et cette structuration facilite les synergies entre les différents programmes ; l'objectif n'est donc pas seulement financier.
Concernant le déroulement de la discussion budgétaire, qui fait également l'objet d'une de vos questions, l'existence d'un programme « Justice judiciaire » à l'intérieur de la mission Justice fait que nous abordons directement les questions relatives à cette composante. L'élaboration d'un budget prend une année, avec plusieurs cycles de réunions. À la direction du budget, notre interlocuteur principal est le secrétariat général du ministère de la justice, mais nous sommes également en contact avec ce que nous appelons les directions métier, notamment la direction des services judiciaires (DSJ) : elles participent directement aux trois conférences budgétaires étalées sur le premier semestre. Ce sont elles qui viennent directement nous expliquer leurs mesures et leurs demandes budgétaires.
Il s'agit pour nous d'un point très sensible : si on peut difficilement se passer de chiffres pour construire un budget, on ne peut se contenter de ces données. On a également besoin de s'appuyer sur les spécialistes métier. L'immobilier, par exemple, ne peut être piloté uniquement à partir de tableaux de chiffres : il faut apprécier la nature des opérations, leur complexité, les risques qu'elles comportent. Et cela vaut pour tous les sujets budgétaires. Le processus consiste à appréhender les besoins exprimés et à en faire la synthèse afin de les expliquer à ceux qui vont avoir à décider. Il fait intervenir les cabinets ministériels et Matignon. Chaque fois que nous avons des discussions budgétaires avec le ministère de la justice, les différents interlocuteurs veulent comprendre ce qu'il y a derrière les mesures.
L'autre particularité du secteur, c'est que la discussion est encadrée par la loi de programmation de la justice. Quand nous discutons de l'évolution des moyens de la justice et du budget annuel, nous appliquons une référence, que nous avons d'ailleurs contribué à bâtir et qui a fait l'objet de nombreuses discussions et échanges. Pour l'immobilier, par exemple, une référence, que nous actualisons en fonction des écarts de crédits observés, fixe le cadre général des discussions, et cela vaut pour tous les services, y compris les services judiciaires.
Vous avez souhaité savoir comment nous suivions les tribunaux et les services déconcentrés. La direction du budget intervient à un niveau « macro », si je puis m'exprimer ainsi : nous ne discutons pas avec le ministère à un niveau extrêmement fin. C'est à ce dernier que revient la responsabilité de mener les dialogues de gestion en interne, d'agréger les besoins et de les faire remonter. Nous discutons non pas au niveau du tribunal ou de la cour d'appel, mais au niveau global. S'il y a des particularités locales, par exemple un gros projet immobilier, nous pouvons alors nous en saisir, mais notre rôle n'est pas de regarder à ce niveau de détail. Pour pouvoir vous répondre, nous nous sommes donc adressés au contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM) et aux contrôleurs budgétaires régionaux (CBR), qui suivent la gestion du ministère de la justice de manière beaucoup plus précise et au plus près de sa structuration sur l'ensemble du territoire.
Nous sommes très attentifs par ailleurs aux rapports publiés, qui nourrissent évidemment la discussion budgétaire, non seulement par les propositions avancées sur l'évolution de la structure et des moyens, mais aussi par les connaissances qu'ils permettent d'acquérir hors champ financier.
Un des enjeux majeurs de la procédure budgétaire réside dans les informations de gestion et dans la façon dont elles nous sont transmises. La préparation du budget s'appuie à la fois sur les directions métier et sur le secrétariat général du ministère de la justice, en charge de l'élaboration et de la synthèse. C'est l'interaction entre ces différents acteurs qui permet d'établir un dossier budgétaire, de préparer les arbitrages, puis de mettre en œuvre les décisions. C'est pourquoi nous nous efforçons d'acquérir une connaissance précise de la situation du ministère.
Ce travail se traduit dans les documents budgétaires qui vous sont transmis qui comportent une partie sur les chiffres et les mesures et une partie sur les indicateurs. Celle-ci gagnerait sans doute à être renforcée et améliorée s'agissant de la mission Justice, car tous les indicateurs ne sont pas forcément renseignés au moment de la présentation. Or, ils reflètent l'objectivation des demandes recueillies auprès des directions métier, le travail de compréhension des ressorts de l'action, qui dépasse le simple cadre du témoignage ponctuel.
Souhaitez-vous que je passe en revue rapidement les questions que vous m'avez envoyées ?