Je sais que vous travaillez sérieusement à la révision de la Constitution. Les réponses que nous avions apportées dans notre projet de réforme, si elles peuvent être améliorées, balayent l'essentiel des sujets. Je ne vois donc pas a priori d'innovation à introduire.
L'irruption du terrorisme n'a pas changé de façon substantielle les pratiques. En tant que garde des Sceaux, j'ai participé au Conseil de défense. Le Président de la République, qui préside les Conseils de défense, réunissait les ministres régaliens. On est dans une autre temporalité dans ces moments-là, incontestablement.
Cela a également une influence sur la temporalité d'après. J'ai organisé en avril 2015 les premières rencontres internationales de magistrats antiterroristes. Une soixantaine de pays étaient représentés au plus haut niveau possible, certains par leur procureur national. Nous avons travaillé trois jours à huis clos, mon objectif étant de faire en sorte que l'on soit de plus en plus efficace. La coopération pénale internationale est parfois compliquée, les juridictions des autres pays ne répondant pas toujours aux commissions rogatoires. Quand les gens se connaissent, en général ils travaillent mieux ensemble. J'ai constaté très vite les effets de ces rencontres, même en dehors de la procédure criminelle, lors des attentats du 13 novembre 2015. Ainsi, concernant les certificats de décès, qui déclenchent toutes les démarches, j'ai appelé le président du tribunal pour voir s'il était possible d'accélérer la procédure pour les victimes et leurs familles : ils ont fait en trois jours ce qui en prenait quinze habituellement. Gloire à eux ! Mais au dernier moment, une difficulté a surgi sur un nom, en raison d'informations contradictoires : c'est la coopération entre magistrats qui a facilité les choses. J'ai pu constater dans d'autres cas également que les procédures vont beaucoup plus vite lorsque les magistrats se connaissent.