Je pense que nous devrions davantage lier la question du niveau de langue à celle du renouvellement du titre de séjour. Il doit y avoir un enjeu à être assidu et investi dans l'apprentissage de la langue. L'absence d'enjeu constitue selon moi un frein à l'effort d'apprentissage pour une partie de ceux qui malheureusement nous posent le plus de problèmes. De nouveau, les exemples étrangers devraient nous inspirer. Les pays étrangers sont beaucoup plus exigeants, ce qui les rend plus attentifs aux questions d'intégration. En France, l'intégration est totalement gratuite et sans enjeu, sauf pour l'obtention de la nationalité française, pour laquelle les conditions sont plus fortes. Par exemple, nous ne pouvons pas nous contenter de donner un titre pluriannuel à une personne assidue uniquement à 80 % des cours.
En outre, je regrette que dans le cadre de l'évolution du contrat d'accueil d'intégration en contrat d'intégration républicaine, on ait supprimé la possibilité de commencer les cours de français dans les pays d'origine. Cette décision a fragilisé un public de femmes qui arrivant en France dans le cadre du regroupement familial sont aspirées par les contraintes domestiques, genrées, et ont moins de temps et d'effort à consacrer à l'apprentissage de la langue. Les cours de langue dans les alliances françaises étaient très positives pour ces institutions et pour ces personnes. L'étude Trajectoire et origine de l'INSEE révèle que la Turquie est la seule immigration dans laquelle les jeunes filles ont des résultats inférieurs à ceux des garçons, ce qui constitue un signe de difficulté d'intégration. Auparavant, ces femmes commençaient les cours à l'alliance française en Turquie, ce qui constituait une base favorable pour suivre des cours en France. Ce sujet devrait être remis à l'ordre du jour. Un certain nombre de pays le font, même de manière dématérialisée. L'absence d'attention à la langue nous a peut-être handicapé sur le plan de l'intégration. Nous n'y avons pas été assez attentifs lorsque le patronat avait des emplois à proposer et où la question de la langue était secondaire.
Une part de notre immigration aujourd'hui ne vient pas de zones historiquement francophones, mais du sous-continent indien, d'Afghanistan, du Soudan, etc. Nous ne sommes pas suffisamment attentifs à ces questions de langue. Ce peut être un regret personnel. Nous passons plus de temps dans un certain nombre d'enceintes à discuter de l'apprentissage des langues régionales que d'aide des immigrés à apprendre la langue française.