Ces dossiers se distinguent nettement des affaires d'imputabilité principalement politique qui concernent d'anciens interprètes ou policiers, pour lesquelles nous appliquons un raisonnement issu de la convention de Genève de 1951. Ils imposent au juge d'apprécier le niveau d'intensité de la violence dans le pays, son caractère exceptionnel. Le régime des directives européennes le lui prescrit afin d'évaluer les craintes d'un demandeur d'asile par rapport à une situation de conflit armé.
Le juge vérifie si le seul fait qu'une personne se trouve sur telle portion de territoire à un instant donné justifie qu'elle craigne pour sa vie. La vérification comprend les étapes du trajet d'un éventuel retour. Elle prend en compte la possibilité d'obtenir sur place des protections étatiques et de recourir à des services publics. Sur les faits de violence, elle s'intéresse à la nature des forces en présence, au type et à la fréquence des attentats, ainsi qu'aux cibles visées.
Répondant à la question préjudicielle qu'un juge allemand lui avait posée, la CJUE a indiqué qu'il n'était pas possible de se référer uniquement à un pourcentage de décès ou de personnes blessées parmi une population civile donnée pour apprécier le niveau de violence de la région dont provient le demandeur d'asile. L'analyse doit s'étendre à d'autres critères, tant quantitatifs que qualitatifs.
La jurisprudence européenne a progressivement dégagé l'ensemble de ces éléments communs d'appréciation. Les guides que le bureau européen d'appui en matière d'asile édite en reprennent les principes. Complexe, le raisonnement dépend à l'évidence étroitement d'un contexte donné et de son évolution. Dans le cas de l'Afghanistan, le départ annoncé des forces américaines, ses conséquences sur la situation politique locale, est susceptible d'infléchir la jurisprudence de la CNDA relative à ce pays, comme celle d'autres juges européens.
Le travail d'appréciation du juge demeure semblable pour nombre d'autres pays en conflit : la Somalie, le Soudan, la Syrie, la Libye, le Mali. Il repose sur des éléments éminemment factuels et nécessite une documentation à jour, au plus près de la réalité.