Intervention de Dominique Kimmerlin

Réunion du mercredi 16 juin 2021 à 18h30
Commission d'enquête sur les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d'accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides en regard des engagements nationaux, européens et internationaux de la france

Dominique Kimmerlin, présidente de la Cour nationale du droit d'asile :

Depuis cinq ans, le service public de la justice et de l'asile en outre-mer repose principalement sur le système des visio-audiences.

Auparavant, la CNDA organisait des missions foraines. Elles ne pouvaient se dérouler que tous les six mois environ. Elles perturbaient sur place la marche des autres juridictions dont la CNDA utilisait les locaux, ainsi que la défense qui devait se consacrer au contentieux de l'asile pendant toute leur durée. Les demandeurs attendaient en définitive beaucoup plus longtemps qu'à présent le jugement de leurs affaires.

De ce point de vue, la visio-audience a significativement renforcé la qualité du service rendu. Elle permet de juger au quotidien, et dans des délais convenables, des demandeurs d'asile qui se trouvent à Mayotte, en Guyane, ou dans d'autres territoires et collectivités d'outre-mer. Désormais d'un usage courant, elle ne pose pas de problème d'organisation. Ce constat explique certainement pourquoi, en 2018, le législateur a imaginé en étendre l'utilisation à la métropole.

Votre remarque sur l'absence fréquente des requérants lors des jugements me surprend. Dans plus de 70 % des cas, les affaires se jugent en audience, c'est-à-dire en présence du demandeur, de son conseil et de l'interprète que la Cour met à sa disposition.

Quant à la faculté de juger par ordonnance, sans audience, elle n'empêche pas une même qualité de l'instruction. Bien au contraire, ce sont des rapporteurs spécialisés et expérimentés qui se chargent alors de l'instruction des dossiers. De plus, la loi de 2011 réserve le jugement par ordonnance à la seule hypothèse dans laquelle le recours ne comporte aucun élément de fait ou de droit sérieux de nature à remettre en cause la décision du directeur général de l'OFPRA. Cette hypothèse renvoie à la situation où un demandeur ne formule pas de contestation intelligible et suffisamment argumentée devant la Cour. Par ailleurs, seuls les présidents permanents de la Cour, au nombre de vingt-sept, sont habilités à juger par ordonnance. Enfin, à tout moment, un dossier initialement orienté en vue de son traitement par ordonnance peut faire l'objet d'un renvoi à l'audience.

Ce système actuel me paraît assurer un juste équilibre entre les enjeux de capacité de jugement et ceux de la préservation des droits des demandeurs d'asile.

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