Les spécificités des besoins de santé des personnes migrantes sont assez bien documentées. Nous sommes face à un apparent paradoxe : les migrants, du fait de leur âge peut-être, sont plutôt en meilleure santé que la moyenne des personnes dans leur pays d'origine et dans leur pays d'accueil. Mais leur état de santé se dégrade au cours de leur parcours migratoire.
Il existe des prévalences spécifiques liées au parcours migratoire et aux conditions d'accueil dans les pays d'arrivée. Les prévalences spécifiques concernent les infections sexuellement transmissibles ; l'exposition aux violences sexuelles, notamment pour les femmes migrantes ; la tuberculose ; le paludisme ; les problèmes dentaires spécifiques ; l'augmentation des conduites addictives et des pathologies cardiovasculaires au cours du parcours migratoire, compte tenu des difficultés rencontrées par ces personnes et de leurs conditions de vie.
Nous insistons également sur la spécificité de ce public au regard des troubles mentaux. Ces personnes sont plus fortement exposées à des facteurs de stress post-traumatique, à la fois dans leur pays d'origine, dans les pays traversés et dans les pays d'accueil. Ces facteurs touchent notamment à la précarité, aux violences subies sur le chemin et à l'incertitude liée au parcours migratoire. Il existe donc une spécificité de besoins de soins psychiatriques pour les personnes migrantes. Cette spécificité est déjà prise en compte grâce aux PASS spécialisés en psychiatrie et aux équipes mobiles psychiatrie et précarité. Ainsi, le soin primordial à apporter est souvent la stabilisation de la personne du point de vue de la santé mentale.
Il pourrait être utile d'auditionner, si vous ne l'avez pas déjà fait, la direction générale de la cohésion sociale, qui dispose d'une bonne vision de ces publics, ainsi que le ministère du logement sur la stabilisation de ces personnes par le logement.
Vous mentionniez les problématiques d'interruption des parcours de soins. La difficulté est que ces personnes ne sont elles-mêmes pas stabilisées dans une résidence principale, un domicile fixe et personnel. S'agissant des conduites addictives notamment, la stabilisation dans un lieu de vie est souvent un préalable fondamental à la mise en place des soins autour de la personne. Cela renvoie par exemple à des dispositifs comme les appartements de coordination thérapeutique qui permettent, en stabilisant la personne dans un logement personnel et individuel, d'organiser la prise en charge des soins et l'accompagnement social nécessaire – car des problématiques d'accès au droit existent évidemment en parallèle des problématiques d'accès aux soins.