Intervention de Guillaume Rossignol

Réunion du mercredi 21 juillet 2021 à 16h15
Commission d'enquête sur les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d'accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides en regard des engagements nationaux, européens et internationaux de la france

Guillaume Rossignol, directeur adjoint de Jesuit Refugee Service (JRS) :

L'accès à la langue et au français est essentiel dès la demande d'asile. Il est donc regrettable d'attendre que les personnes soient réfugiées pour constater que 80 % d'entre elles ne possèdent pas la langue. À une période où l'on vote des lois relatives au communautarisme, etc., il paraît vraiment étonnant que la question de l'apprentissage de la langue ne soit pas abordée dès l'arrivée sur le territoire. Il constitue un bagage essentiel, soit pour l'intégration, si ces personnes restent en France, soit pour le retour au pays, si elles repartent.

JRS possède une école de français dédiée aux demandeurs d'asile à Paris qui accueille et accompagne chaque année une centaine de demandeurs d'asile. Nous constatons très concrètement les effets positifs de l'apprentissage du français, la joie d'apprendre, dès l'arrivée sur le territoire.

Le service d'insertion des réfugiés intervient à une période qui est complexe pour les personnes. En effet, alors que l'obtention du statut de réfugié représente un grand moment de joie, la situation n'évolue pas vraiment positivement puisque le droit à l'ADA est aboli et le réfugié doit alors se rendre au SIR, sans pouvoir travailler. Le SIR n'est donc pas toujours appréhendé comme un atout. Pour autant, nous reconnaissons les évolutions positives du SIR.

La circulaire Cresson a modifié la partie réglementaire du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), en vigueur à l'époque. Ensuite, des évolutions législatives, liées à la transposition dans le droit français de directives européennes successives, ont conduit à intégrer dans le système législatif français un mécanisme qui, de fait, ferme l'accès au marché du travail des demandeurs d'asile. Ce dispositif soumet l'accès à une autorisation préalable, ce qui ne relève pas du droit commun des étrangers présents sur le territoire. Les demandeurs d'asile sont traités comme des étrangers hors de France alors qu'ils sont déjà présents sur le territoire. Je vous renvoie à notre rapport qui décrit l'ensemble de ces étapes fastidieuses.

S'agissant des professions réglementées, en annexe de notre rapport, page 74, figure un tableau qui liste les professions ouvertes et fermées. À titre d'exemple, pendant la crise sanitaire, l'accès aux professions médicales a été extrêmement facilité et des médecins ont pu exercer dans des conditions très efficaces. Cependant, cet accès a été fermé, une fois que l'urgence a été moindre. Les professions d'enseignant sont totalement fermées alors qu'en Suède, par exemple, il existe des dispositifs qui permettent aux enseignants, très rapidement, dès leur arrivée sur le territoire, d'être mis au service des communautés qui arrivent, d'enseigner dans leur langue et, progressivement, d'apprendre la langue du pays et d'enseigner dans la langue du pays. Il serait utile de reprendre ou de s'inspirer de ce type de dispositifs.

Plus généralement, il nous paraît essentiel d'éviter le déclassement professionnel des personnes. Elles ont envie de réussir ou de rendre ce qui leur est donné et viennent enrichir de leur talent la communauté ou le pays d'accueil.

S'agissant de l'aspect interministériel, nous abondons dans votre sens. Notre rapport recommande que la politique d'intégration soit beaucoup plus interministérielle. Le ministère de l'Éducation nationale et le ministère de la Culture devraient intervenir davantage dans la définition de ces politiques. Nous louons le travail de la Délégation interministérielle à l'accueil et à l'intégration des réfugiés (DIAIR), avec laquelle nous avons collaboré sur plusieurs sujets, notamment sur leur plateforme « Réfugiés.info ». Nous contribuons à l'écriture de fiches, notamment pour l'accès aux professions réglementées. À la rentrée prochaine, nous souhaiterions mettre en place un atelier d'accès aux professions réglementées en collaboration avec la DIAIR, avec le CIDJ, etc. Bref, nous tenons à souligner l'importance du travail interministériel.

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