Les personnes étrangères constituent une population clé de l'épidémie de VIH en France. AIDES et ses militants sont engagés dans la défense du droit au séjour pour soins. Elle accompagne dans l'obtention de leurs papiers, des personnes étrangères vivant avec le VIH. Nos militants travaillent en partenariat avec d'autres associations sur le terrain, notamment l'ARDHIS, avec qui nous avons écrit un rapport sur les discriminations relatives à l'asile en 2018. Les différents assauts portés contre les politiques migratoires ces dernières années ont entraîné une baisse significative du droit au séjour pour soins depuis 2018. Le passage de l'évaluation médicale des ARS à l'OFII a entraîné une baisse de l'octroi des titres de séjour pour soins. La délivrance d'un titre de séjour pour soins permet en effet de stabiliser la situation des personnes en France et de les sortir de la précarité en leur donnant accès à des droits sociaux. L'accompagnement des personnes souffrant du VIH est primordial dans la lutte contre l'épidémie, car elles ont ainsi accès aux traitements et cessent de transmettre le VIH.
Avec les ARS, les avis favorables atteignaient 75 à 80 % en 2014. Depuis la reprise de l'évaluation médicale par l'OFII, ce taux a baissé à 55 %. Parmi les obstacles aux droits d'accès au séjour, les demandeurs d'asile ont l'obligation de déposer simultanément toutes les demandes de titres auxquelles ils prétendent, dont la demande de séjour pour soin. Ils ont trois mois pour le faire à compter du dépôt de la demande d'asile, ce qui est extrêmement court. En effet, il faut être conscient que les personnes se contaminent en France, notamment parce que la précarité de leur situation sociale les conduit à prendre des risques. Par exemple, de nombreuses femmes témoignent que, se trouvant à la rue, elles acceptent des relations sexuelles contre un hébergement. Pour nous, la double demande d'asile et de soin est un obstacle supplémentaire à cause de ce délai trop bref. Toutefois, la loi prévoit que la personne puisse éventuellement faire état de circonstances nouvelles si elle n'a pas déposé sa demande dans les trois mois. Cette notion très large donne cependant lieu à des interprétations divergentes selon les préfectures, dont certaines n'acceptent pas de prendre en compte ces circonstances nouvelles. Depuis 2010, nous sommes dotés d'un observatoire « étrangers malades » qui nous permet de recenser les parcours des personnes malades accompagnées chaque année. Nous pouvons ainsi produire des statistiques chaque année, notamment dans le cadre du rapport « Discrimination ».
Un autre élément inquiétant est la restriction de l'accès à la santé pour les personnes étrangères depuis 2019, qui a coïncidé avec le début de l'épidémie de coronavirus. Fin 2019, une nouvelle mesure a freiné l'accès aux soins des demandeurs d'asile en instaurant un délai de carence de trois mois. Or, les demandeurs d'asile sont en situation régulière sur le territoire. Cette mesure est donc symboliquement très forte à l'encontre de personnes vulnérables et parfois en situation de santé précaire, et traumatisées de surcroît. Ce cumul de vulnérabilité impose un accompagnement et une prise en charge immédiats dès l'arrivée sur le territoire. En cas de difficulté de santé, les demandeurs et demandeuses d'asile ne peuvent accéder aux soins que dans les hôpitaux, qui sont saturés à cause de la crise sanitaire. En outre, les soins hospitaliers sont plus coûteux que les soins ambulatoires.
Les réformes concernant l'aide médicale d'État et les maintiens de droits ont conduit à construire des dispositifs de soins et de santé différenciés en fonction de la situation administrative des personnes, au lieu d'accorder un accès aux soins à tous. Ces différences entraînent des ruptures de soins et de droits. Ne pouvant plus obtenir de carte Vitale depuis 2017, les demandeurs d'asile se tournent vers l'hôpital public. Par conséquent, un certain nombre de personnes renoncent aux soins.
Les recommandations d'AIDES portent sur la simplification de ces dispositifs et la renonciation au délai de carence pour les demandeurs d'asile ainsi que l'intégration de l'aide médicale d'État au budget de l'Assurance maladie.