Madame la directrice, je souhaite réagir à certains de vos propos qui m'ont presque empêchée d'accorder à votre intervention toute l'attention qu'elle mérite en raison du rôle essentiel que vous jouez dans le dispositif d'accueil des mineurs. Vous avez en effet parlé d'« appel d'air » ; or, je ne peux plus entendre cette expression, qui ne correspond pas à la réalité des faits que nous constatons depuis la crise de 2015-2016. Nous devons être attentifs aux mots que nous utilisons.
Au regard de l'accueil qui est réservé aux migrants ailleurs en Europe ou dans les pays voisins de certains conflits internationaux, nous faisons bien peu, en définitive. On parle d'appel d'air tout en élevant, par la multiplication des difficultés, notamment administratives, des barricades qui font de l'émigration dans notre pays un véritable parcours du combattant pour les étrangers. Il faut être prudent. Je ne nie pas la réalité des difficultés des administrations et des problèmes d'ordre public, mais voyez les obstacles que rencontrent les étrangers pour obtenir ne serait-ce qu'un rendez-vous à la préfecture, voyez le nombre de jeunes de 16 ans ou, certes, parfois de 22 ans qui vivent dans la rue dans des conditions indignes, sont livrés à eux-mêmes et, forcément, participent à divers trafics. Craindre un appel d'air alors qu'on mène des politiques qui ne sont pas aussi inclusives qu'elles devraient l'être, c'est manquer de cohérence. Je pense au jeune qui a eu la chance d'être reconnu mineur et de suivre un apprentissage mais qui ne peut pas être embauché au terme de celui-ci, faute de pouvoir obtenir un titre de séjour. Il faut mettre fin à ce type d'incohérences ! Aussi, je vous le dis avec le cœur, madame la directrice : je ne peux plus entendre parler d'appel d'air.
Construisons un parcours légal d'immigration au lieu d'élever des barrières en considérant que nous n'avons pas besoin d'immigration : cela ne correspond ni à la réalité de notre pays, ni aux aspirations des étrangers, ni aux besoins de notre économie.