Intervention de Sonia Krimi

Réunion du mercredi 6 octobre 2021 à 14h30
Commission d'enquête sur les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d'accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides en regard des engagements nationaux, européens et internationaux de la france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSonia Krimi, rapporteure :

J'ai vécu la naturalisation. J'ai fait la queue, j'ai été refusée une première fois et j'avais un collègue avocat qui m'a conseillé, comme j'étais encore jeune, d'attendre deux ans. Au bout de deux ans, j'ai encore une fois été ajournée. Puis, ce même ami avocat m'a aidée et c'est ainsi que j'ai obtenu la nationalité française. Vous nous avez dit que nous sommes peut-être un peu éloignés de la réalité, mais je vous assure que beaucoup de députés présents ici ont vu ce que sont les queues et la lassitude. Cela ne remet nullement en cause la compétence des personnes que l'on trouve dans les services administratifs, mais ces dernières sont souvent dépassées et on y est parfois très mal accueilli. Les moyens qui sont mis ne sont pas toujours très satisfaisants.

Ma première interrogation porte sur la numérisation. Quand on est député, qui plus est de la majorité, on entend parler des 530 millions d'euros, des douze chantiers de numérisation et de sa généralisation. Il existe un rendez-vous biannuel avec le ministre de la Justice. Le dernier a eu lieu en février 2021 pour voir sur quels points on avance. En tout cas, ce que nous avons voté est le fait que ces procédures deviennent lisibles et accessibles. Je fais partie des personnes qui auraient préféré à l'époque envoyer mon dossier par Internet que de prendre toute une journée de congé pour le déposer. Cela signifie-t-il que nos dispositions n'arrivent pas jusqu'au terrain ? Ou que l'on ne met pas assez de moyens là où sont les besoin ? Si oui, sur quels chantiers souhaitez-vous que l'on essaie d'attirer l'attention de notre ministère de la Justice dans le cadre de nos recommandations ?

Ma seconde interrogation concerne plutôt les conséquences du non-respect des délais de jugement. Parlez-nous des femmes et des hommes que vous rencontrez. Quelle est la conséquence du non-respect de ces délais ? Vous avez évoqué la nécessité d'assortir les délais de sanctions, il s'agira peut-être de l'une des recommandations que nous porterons.

L'une des propositions de notre rapport, que nous avons vue ailleurs, serait de mettre de plus en plus de médiateurs culturels dans l'ensemble du droit, en tout cas dans le droit des étrangers. Il s'agirait en substance de faire en sorte qu'un policier ne parle plus directement avec un migrant. Là où cela existe, cela se passe bien et rapproche parfois des visions très différentes. Je m'explique : les acteurs du droit des étrangers sont l'État, les collectivités territoriales et les ONG, et ils ne communiquent plus entre eux. Des « médiateurs culturels » qui sont plus que des traducteurs, sont capables d'accompagner un policier et de parler dans la langue de la personne, ne serait-ce que pour lui rappeler ses droits fondamentaux. Lorsque je commence à proposer cela, je vois les grimaces d'un ministère qui peut-être m'avertit que cela risque d'augmenter le nombre de contentieux. Je pense au contraire, même si cela se produira au départ, qu'avec le temps cela permettra peut-être aux policiers de mieux connaître le droit. Cela permettra aussi de comprendre les difficultés du travail d'un policier. Il s'agit peut-être là d'une idée naïve, mais je voudrais connaître votre avis sur ce point.

Je terminerai par une autre recommandation. Avant 2007, la compétence de l'immigration était partagée entre le ministère des affaires étrangères et le ministère des solidarités. C'était un autre temps. Qu'en est-il du retour à une configuration beaucoup plus interministérielle ? Est-il possible face à Médecins du monde d'avoir des personnes des agences régionales de santé (ARS) par exemple ou en tout cas des personnes capables de répondre sur ces sujets, et pas seulement des personnes du ministère de l'intérieur, avec tout le respect que j'ai pour ses compétences ? Qu'en est-il donc du retour à une autre forme de collaboration interministérielle beaucoup plus visible et qui, à mon avis, résoudrait beaucoup de problèmes en amont ?

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