Intervention de Sébastien Nadot

Réunion du mercredi 10 novembre 2021 à 15h00
Commission d'enquête sur les migrations, les déplacements de populations et les conditions de vie et d'accès au droit des migrants, réfugiés et apatrides en regard des engagements nationaux, européens et internationaux de la france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Nadot, président :

Ce rapport constitue un travail extrêmement sérieux et de qualité, qui peut améliorer la situation. Telle était bien l'ambition à l'origine de la création de cette commission d'enquête. Je suis d'accord avec les deux tiers des propositions et je voterai donc en faveur du rapport. Le fait que la promesse républicaine de l'accès au droit ne soit pas tenue y est bien identifié. C'est un point essentiel.

Dans mon avant-propos, j'ai essayé de reconstituer l'histoire qui part d'une idéologie politique émergente à partir de 2007, visant à restreindre l'immigration, qui trouve ensuite un écho auprès de certains hauts fonctionnaires, puis est intégrée par de nombreux fonctionnaires, pour finir par être relayée par les médias et s'installer dans l'esprit du grand public. Le moment est extrêmement grave et nous faisons face à une idéologie contraire aux lois de la République, qui s'est immiscée dans les esprits et a été progressivement intériorisée. Nous avons eu suffisamment d'auditions au cours desquelles des hauts fonctionnaires ont pris des positions contraires à l'esprit républicain – et en tout cas contraires à leur devoir de respect de la loi – pour mesurer la gravité du problème.

Je me félicite donc que nous ayons entendu les premiers concernés, à savoir les migrants, pour pouvoir redonner un aspect humain à ce débat. Ils sont devenus totalement invisibles, la numérisation supposée magique des procédures d'accueil des migrants ne faisant que renforcer les problèmes. Où que l'on regarde, que ce soit le logement, la justice ou l'accès aux documents administratifs, nous sommes dans un pays qui organise manifestement l'ostracisme des étrangers. Voilà la conclusion à laquelle j'ai abouti.

Je voudrais revenir sur une proposition qui m'est chère et concerne les centres de rétention administrative. Peut-on admettre d'y enfermer des enfants en France au XXIe siècle pour des raisons de commodité ? D'autres solutions sont possibles pour les familles avec enfant, avec l'assignation à résidence, à domicile ou dans des hôtels. Il faut cesser de croire que les gens s'enfuient systématiquement. Une réflexion et une avancée sont nécessaires sur cette question. Le fait que le France soit condamnée tous les ans par la Cour européenne des droits de l'homme est un signal qui ne doit pas être pris à la légère.

Par ailleurs, je constate qu'aucune politique cohérente n'est menée pour les mineurs non accompagnés.

Les constats réalisés par cette commission d'enquête sont assez lourds de conséquences, à l'image du moment que nous vivons. Il ne faut pas se leurrer : les faits observés à Calais ou à Briançon ne concernent pas que les frontières. Ils sont révélateurs d'une situation générale sur l'ensemble du territoire. Il suffit pour s'en convaincre d'avoir assisté à l'évacuation d'un squat, au cours de laquelle on laisse des enfants dormir dehors en pleine nuit, sous la pluie – tout cela pour protéger un bien.

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