Je tiens d'abord à remercier la rapporteure pour son travail. Pour avoir participé à beaucoup des auditions de cette commission d'enquête, je sais combien la matière brute est importante. Le champ était très vaste, peut-être trop, et la synthèse est compliquée. Je me demandais comment résumer tout cela en seulement une centaine de pages, et je trouve intéressant d'arriver à sérier les sujets comme la rapporteure le propose. Je me permets juste de regretter que les modalités d'accès au rapport aient été limitées.
Il ressort de vos derniers propos, monsieur le président, une mise en cause de l'administration. Vous avez même parlé d'illégalité. Je suis moi-même intervenue lors d'une audition où une haute fonctionnaire employait l'expression « appel d'air » de façon si directe que j'avais eu besoin d'exprimer un rappel à l'ordre. Je ne pense pas cependant que l'on puisse mettre en cause de façon large et générale l'administration.
Le rapport qui nous est proposé contient trente recommandations. J'en partage la plupart, ainsi que le diagnostic posé. Je vois un point de désaccord dans la recommandation n° 29 sur la rétention des familles avec enfants. Je préférerais que nos conclusions écartent le séjour de ces familles en centre de rétention, et préconisent plutôt l'assignation à résidence. Le centre de rétention affecte en effet profondément les enfants. J'aimerais que nous en discutions, mais je me rangerai à l'avis de Mme la rapporteure.
Le rapport a plusieurs axes forts, à commencer par la recommandation n° 9 sur la dimension interministérielle du sujet. Transformer la DIAIR en Haut-Commissariat est une option intéressante. Nous devons évoluer sur ce sujet. La création d'une agence de l'asile de l'Union européenne et les propos sur l'EASO, le bureau européen d'appui en matière d'asile, qui est en cours de construction, me semblent aussi pertinents, mais je laisse les spécialistes des affaires étrangères développer le sujet.
S'agissant de l'accès aux droits, vous savez peut-être que j'ai travaillé sur le problème majeur de l'accès aux préfectures, avec la dématérialisation de la prise de rendez-vous, ainsi que sur l'accès à la santé. Les recommandations nos 13, 14 et 15 vont tout à fait dans le sens des auditions que j'avais menées. Il nous faut une alternative à la prise de rendez-vous dématérialisée. Il nous faut surtout, parce que c'est le cœur du problème, élargir les créneaux de rendez-vous en préfecture. Je préconise une précision sur ce point, car il n'y a pas d'indicateur en la matière : rien ne permet de constater que M. Untel n'a jamais réussi à se connecter entre telle et telle date. Nous devrions pousser à l'évaluation, par les services de l'État et par le Parlement, de cette question très sensible. Il faut également renforcer les moyens consacrés aux bureaux des étrangers des préfectures. Nous avons adopté, à l'initiative de Jennifer de Temmerman, un amendement au projet de loi de finances qui en augmente les moyens humains.
L'accès à l'emploi des étrangers est un véritable parcours du combattant. Il convient d'y remédier. Merci à Mme la rapporteure d'avoir mentionné les études nombreuses qui démontrent les conséquences positives du travail des étrangers pour notre économie et nos emplois, et pour eux-mêmes bien sûr. Il est difficile de lutter contre les idées reçues, mais nous avons vraiment matière à argumenter : nous avons tout intérêt à faciliter le travail des étrangers présents sur notre territoire.
Je termine avec la recommandation n° 22, qui concerne Calais. Vous préconisez de petites unités de vie le long du littoral. J'ai moi-même pu faire ce type de proposition en travaillant sur le sujet, bien que n'étant pas de la région – car c'est un problème qui nous concerne tous et qui se produit à toutes nos frontières. La crise particulière qui se déroule à Calais a entraîné un travail de médiation, mené sous la responsabilité de Didier Leschi, directeur général de l'OFII (Office français de l'immigration et de l'intégration), qui sera très intéressant à suivre. La mise en place d'un dispositif permettant d'héberger les étrangers une nuit et de les orienter pour la suite va dans le bon sens. Ce ne sont pas des petites unités de vie le long du littoral, mais c'est tout de même une étape qui mérite d'être expérimentée, même si je sais que la municipalité de Calais y est tout à fait opposée. Je pense qu'il ne faut pas avoir peur de se remettre en cause là-bas, compte tenu des difficultés observées. La médiation permanente est difficile, mais nécessaire. Nous pourrions compléter cette recommandation n° 22 en insistant sur l'absolue nécessité d'organiser les discussions, la collaboration, la coopération dans ce secteur, tout en sachant combien c'est difficile.