Intervention de Michel Tubiana

Réunion du mercredi 7 octobre 2020 à 17h30
Commission d'enquête relative à l'état des lieux, la déontologie, les pratiques et les doctrines de maintien de l'ordre

Michel Tubiana, président d'honneur de la Ligue des droits de l'Homme :

Vous connaissez comme moi l'adage : « La femme de César doit être insoupçonnable ». À Strasbourg, au Conseil de l'Europe, il se traduit par la maxime selon laquelle la justice ne doit pas être simplement indépendante, elle doit donner l'apparence de l'indépendance en plus d'être, dans sa représentation, indépendante. Vous ne convaincrez jamais les gens, même s'ils ont tort, que le processus judiciaire est indépendant lorsque des policiers ou des gendarmes enquêtent sur leurs homologues.

Le système anglais est à considérer, moyennant toutes les adaptations possibles, car nous sommes français et ils sont anglais, et que par conséquent les situations psychologiques varient et le rapport aux communautés n'est pas le même. Il s'agit néanmoins d'un élément à prendre en considération, que je ne comprends pas qu'on écarte d'un revers de main depuis des décennies, tous gouvernements confondus, car une telle attitude participe des mauvais rapports entre la population et la police, à partir du moment où l'entre-soi prime – dans l'apparence, du moins.

Votre question est révélatrice : le législateur, les ONG, comme le Gouvernement sont dans l'ignorance des chiffres exacts dans ce domaine.

Il se trouve que la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), dans laquelle je siège au nom de la Ligue des droits de l'Homme, travaille également sur les rapports entre la police et la population. Nous avons auditionné le parquet de Paris. Une chose m'a frappé : lorsqu'il s'agit de comportements « ripoux » de policiers, c'est-à-dire de corruption, nous avons l'impression que l'IGPN fait son boulot. En revanche, dès lors qu'il s'agit de comportements des forces de l'ordre dans l'exercice de leurs fonctions, nous avons quelques doutes sur ce point.

Un exemple : le parquet de Paris a convenu au cours de son audition qu'il y avait un problème lorsque nous avons souligné que nous n'avions pas connaissance de plus de deux exemples de violences policières accompagnées de la circonstance aggravante de racisme. Or dans le lot de ces mêmes violences, il ne s'agit pas d'une chose extraordinaire, et je ne dis pas que la police est raciste. Or en la matière, nous n'avons rien, aucun élément !

J'ai vu avec bonheur – enfin, si je puis dire, on n'est jamais heureux que quelqu'un soit sanctionné – que le ministre de l'Intérieur avait tiré les conséquences de l'affaire du groupe WhatsApp. Cependant, pour le reste, nous ne disposons d'aucun chiffre : or ce n'est pas sain en démocratie.

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