Il existe un statut juridique des observateurs qui résulte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Dans un arrêt de 2009 contre la Hongrie, elle qualifie les observateurs des droits humains, pour le cas précis des manifestations, à l'instar de la presse, de « chiens de garde publics ». En vertu de la Convention européenne des droits de l'homme, ils bénéficient de la même protection que celle accordée à la presse. En tant que tels, on estime que les observateurs sont des observateurs passifs et qu'ils ne participent donc pas à la manifestation. Leur fonction consiste à la documenter et ils occupent toujours une posture passive dans le déroulement de la manifestation.
Le fondement et le statut juridiques existent dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, mais ils n'ont pas encore donné lieu à des développements en droit interne, précisément parce que nous n'avons pas encore eu à connaître de contentieux. Mais ce sera le cas à l'occasion du recours concernant le schéma national du maintien de l'ordre.
Cette réponse me donne l'occasion de faire le lien avec la remarque portant sur les journalistes qui n'en auraient pas le titre parce qu'ils ne seraient pas titulaires d'une carte de presse. Pourquoi cette différence ? Les règles légales d'attribution de la carte de presse par la profession sont liées à une définition du statut du journaliste fixée par le code du travail, en son article L. 7111-3. Cette définition réserve l'attribution de la qualité de journaliste et, partant, l'attribution de la carte de presse, au fait d'être rémunéré à titre salarié, soit par un contrat à durée indéterminée, soit par un contrat à durée déterminée – ce qui inclut les piges. Nous savons que, dans notre société, de plus en plus d'activités ne relèvent pas du salariat mais du recours à des sociétés sous-traitantes ou à l'auto-entreprenariat. Les personnes non salariées exercent fonctionnellement la mission propre aux journalistes, notamment au regard de la définition posée par la loi de 2010 sur la protection des sources des journalistes, alors même que l'attribution des cartes de presse est en France conditionnée à une définition insuffisamment large. Je souligne à nouveau que ce constat n'est pas le mien, mais celui du ministre et des services du ministère de l'Intérieur qui l'ont indiqué devant le Conseil d'État. Dans ce contexte, la restriction n'est pas légitime.