Pour ce qui est des policiers qui ne seraient pas assez formés, puisque par nécessité on « réquisitionne » les effectifs de tous les commissariats, c'est en partie vrai, mais aussi en partie faux. C'est une donnée réelle dans le sens où, parmi les effectifs rassemblés, certains sont plutôt spécialisés en police secours, mais il y en a aussi qui sont spécialisés – je pense aux brigades anti-criminalité – dans l'interpellation de fauteurs de troubles ou de délinquants dans des zones ou des circonstances extrêmement difficiles, notamment dans les quartiers qu'on appelle « sensibles » ou « difficiles ». Pour pallier cet inconvénient qui peut être grave, il y a nécessité de former les effectifs à des techniques de maintien de l'ordre. Celles-ci ne sont pas très compliquées sur le fond, puisqu'elles s'appuient généralement sur une capacité de rassemblement et d'intervention en unité constituée. Et désormais, dans les formations initiales que réalise la direction de la formation de la police nationale, une formation de ce type est en partie assurée.
Il faut aussi noter que les manifestations récentes qui ont entraîné cette réaction du Défenseur des droits rassemblaient des manifestants très divers. Et pour ces manifestations, les procédures judiciaires ont permis de déterminer que beaucoup des fauteurs de troubles –mais pas tous – venaient de ces fameux quartiers difficiles, où les policiers des brigades anti-criminalité savent parfaitement les interpeller sans qu'il y ait de difficultés. La particularité qui se présente dans une manifestation urbaine où il y a de nombreux participants, c'est qu'au moment de l'interpellation d'un fauteur de troubles, des mouvements spontanés de solidarité se créent de la part des manifestants, pour rendre l'interpellation plus compliquée. C'est une réelle difficulté, que le schéma national du maintien de l'ordre a bien notée. Et il l'a prise en compte en prévoyant de développer l'information tant des organisateurs des manifestations que des manifestants quant au déroulement de l'événement. À ce titre, l'exemple des policiers allemands qui utilisent des haut-parleurs de très forte capacité pour informer les manifestants d'un événement est particulièrement intéressant à développer.
Vous avez posé une autre question, qui a également été soulevée par le Défenseur des droits, sur le fait que les interpellations très en amont des manifestations étaient en soi critiquables. Il ne s'agit principalement de contrôles réalisés avec l'autorisation du procureur de la République, qui délivre des réquisitions aux forces de l'ordre, en fonction des renseignements obtenus et de l'analyse de la situation faite par les chefs des services d'ordre et des services de police.