Intervention de l'ambassadeur Reggy Martiales Nelson

Réunion du mercredi 14 avril 2021 à 16h30
Commission d'enquête sur la lutte contre l'orpaillage illégal en guyane

l'ambassadeur Reggy Martiales Nelson :

J'attache une grande importance à cet échange auquel vous m'avez convié, sur l'orpaillage illégal. Celui-ci apparaît comme un moteur de la déforestation. Ceci dit, le secteur minier constitue la principale source de revenus du Suriname. Il apparaît dès lors nécessaire de l'encadrer, ce pourquoi nous disposons d'une législation nationale. Notre pays est en outre devenu membre en 2018 de la convention de Minamata sur le mercure.

Au Suriname, les principales exploitations aurifères se situent sur la ceinture de roche verte. Deux grandes multinationales, Iamgold et Newmont, y extraient de l'or, ainsi qu'une entreprise nationale de taille moindre, Grassalco. Une multitude d'entreprises et d'entrepreneurs exploitent enfin des gisements de manière artisanale, à petite échelle. Bien sûr, certains orpailleurs œuvrent clandestinement.

Un rapport publié voici quelques années par une organisation non gouvernementale avait répertorié, pendant la période étudiée, environ 1 000 sites illégaux d'extraction d'or au Suriname. Le gouvernement porté au pouvoir suite aux élections de 2011 a créé une commission spéciale, dont la mission consiste à réguler le secteur de l'exploitation aurifère, en particulier l'orpaillage artisanal et illégal. Cette commission a mené un travail considérable.

Toutefois, le Suriname doit faire face à deux obstacles majeurs. D'une part, l'orpaillage s'implante dans des zones de l'intérieur du pays, étendues et difficiles d'accès, que l'on ne peut rejoindre que par voie fluviale ou aérienne. D'autre part, le gouvernement manque de ressources humaines mais aussi financières.

Voilà pourquoi la signature, le mois dernier, de trois accords avec la République française, a constitué pour notre pays un événement majeur. Le premier a précisé le tracé de notre frontière commune. Une convention d'entraide judiciaire et pénale et une déclaration conjointe sur la gestion commune des fleuves Maroni et Lawa l'ont complété. Le Suriname et la France y sont convenus d'œuvrer ensemble dans la zone frontalière. Ces accords traitent surtout de questions de sécurité liées à la lutte contre la criminalité, dont le trafic de drogue et la traite des êtres humains, mais aussi, bien sûr, l'orpaillage illégal. Des activités criminelles prospèrent en effet sur les deux rives du fleuve Maroni. Au Suriname, et vous me direz ce qu'il en est du côté français, notre gouvernement, non content de lutter contre l'orpaillage illégal, s'efforce de réguler l'extraction d'or légale.

Certains produits utilisés pour l'extraction de l'or, comme le mercure, sont particulièrement polluants. Depuis quelques mois, le gouvernement mène une politique de retrait de permis d'exploitation à ceux qui y recourent. Conformément à la déclaration conjointe récemment signée par la France et le Suriname, notre pays tente de mieux contrôler les activités d'orpaillage dans la zone frontalière et de promouvoir le développement économique durable de la région, conformément aux accords de Paris. Il faut en effet offrir à la population les moyens économiques d'assurer sa survie.

Je souhaiterais porter à votre attention les nombreuses pertes d'emploi occasionnées, dans les villes de l'intérieur du Suriname, par la pandémie de Covid-19. Beaucoup de personnes privées de revenus se sont tournées vers l'orpaillage. Malgré la volonté du gouvernement d'offrir des opportunités économiques à la population, la récente évolution de la situation a incité certains habitants, faute d'autre moyen de subsistance, à se rabattre sur l'orpaillage, encore plus lucratif quand ils recourent au mercure.

Le gouvernement organise depuis peu des réunions avec les parties prenantes pour sensibiliser les habitants du Suriname à l'impact du mercure sur la santé, l'environnement et la biodiversité. Dans le cadre d'une stratégie à long terme, notre institut national pour l'environnement œuvre main dans la main avec les parties prenantes à l'élaboration d'un plan d'action en vue de la réduction de l'utilisation du mercure.

Par ailleurs, notre gouvernement estime capital de veiller à ce que la moindre réunion bilatérale dans le cadre de la coopération avec les pays voisins inscrive à l'ordre du jour la coopération durable. Nous sommes en outre convenus de mettre en place une version révisée du conseil du fleuve Maroni.

Un autre problème se pose à nous : celui du contrôle, difficile, de notre longue frontière sud, particulièrement poreuse aux garimpeiros. La commission de régulation du secteur aurifère souhaite que le recours aux nouvelles technologies nous assure une maîtrise plus efficace de notre frontière sud, avec le Brésil.

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