Intervention de Vincent Blanchard

Réunion du mercredi 12 mai 2021 à 15h00
Commission d'enquête sur la lutte contre l'orpaillage illégal en guyane

Vincent Blanchard, géologue d'exploration – ingénieur géologue :

Je vous relaterai, si vous le permettez, une deuxième intervention des FAG dans la zone de Pedral.

D'abord, concernant la supposée connivence entre orpailleurs légaux et illégaux, ma direction m'a toujours strictement interdit la moindre collaboration, de toute manière illégale et déraisonnable, avec des clandestins, sous peine de nous attirer des ennuis en mettant le pied dans un engrenage dramatique. Apporter un soutien aux clandestins m'apparaît donc hors de question, tant du point de vue du respect de la loi que de notre stratégie locale.

Par ailleurs, des chercheurs d'or clandestins nous volent régulièrement du carburant. En tant que géologue d'exploration, je n'ai pas de permis de port d'arme et ne suis pas formé à la sécurité contre le banditisme. Il s'avère extrêmement désagréable au passionné de géologie que je suis, amoureux de la nature, d'évoluer dans un environnement marqué par la présence constante d'armes, qui me mettent mal à l'aise. La société qui m'emploie est obligée d'engager des professionnels armés pour défendre le site de Saint-Elie. Il m'est difficile de me sentir tranquille en forêt quand j'y croise des garimpeiros munis ne serait-ce que d'un fusil de chasse.

Un jour que j'attendais un véhicule au lac de Petit Saut, une pirogue de clandestins a déposé à terre une dame mal en point. Des orpailleurs brésiliens en règle, qui se trouvaient là, ont commencé à discuter en portugais avec elle. Une balle lui avait à moitié arraché le talon. Les opérateurs miniers légaux, craignant la remise en cause de leur titre de séjour sur le territoire français s'ils s'impliquaient dans des affaires de clandestins, ne voulaient pas appeler les secours. Ils m'ont prêté le téléphone satellite de leur chef pour que je m'en charge, ce que j'ai finalement fait après une communication avec la direction d'Auplata, un concurrent de la société qui m'employait, avec lequel nous entretenions de bonnes relations. L'incident illustre que toute tentative d'aide aux clandestins, de la part d'acteurs légaux, implique de mettre le pied dans un engrenage dangereux, autant pour la notoriété de notre profession que pour la légalité de nos opérations, sans même parler des risques pour notre sécurité individuelle.

En résumé, je n'ai noté aucune collaboration entre orpailleurs clandestins et légaux sur le site de Saint-Elie. Avant de creuser des tranchées dans les environs de Pedral, j'ai dû baliser des chemins. J'ai indiqué aux clandestins que j'ai croisés qu'ils devaient évacuer la zone avant le passage des engins de chantier. Ils ont arraché mes fanions de balisage, que j'ai dû replanter tous les 10 à 50 mètres sur une longueur de 5 kilomètres.

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