Intervention de Vincent Blanchard

Réunion du mercredi 12 mai 2021 à 15h00
Commission d'enquête sur la lutte contre l'orpaillage illégal en guyane

Vincent Blanchard, géologue d'exploration – ingénieur géologue :

J'aimerais évoquer ma deuxième confrontation avec les FAG sur le site de Pedral en 2017, lors de notre campagne de tranchées. Un soir que nous rentrions à notre camp provisoire, « Pedral espoir », après une journée de travail, une trentaine de légionnaires sont arrivés. Ils ont demandé à profiter de notre site pour y passer la nuit, ce que j'ai volontiers accepté, content d'aider ces hommes dont je salue le combat, et de bénéficier de leur présence à la fois sympathique et sécurisante. Trois gendarmes encadraient la troupe, dont une femme, qui la dirigeait.

J'ai découvert avec étonnement, en discutant avec eux, qu'ils marchaient depuis deux jours sans rien trouver. Plus surprenant encore, la cheffe de troupe ne semblait pas au courant de notre présence en forêt, malgré les déclarations « loi sur l'eau » et d'ouverture de travaux miniers déposées auprès des administrations compétentes. Rappelons que le chef de la mine de Saint-Elie collaborait régulièrement avec les FAG.

Les légionnaires, à leur arrivée dans notre camp, ignorant qui nous étions et ce qui nous amenait en forêt, ne savaient pas si nous allions les aider ou non. La cheffe de troupe a paru me soupçonner, dans un premier temps, d'être un clandestin. Bien que je me sois ensuite présenté à elle comme le responsable du camp, elle a poursuivi la discussion avec mon stagiaire géologue afin de lui soutirer le plus d'informations possible. Je l'ai perçu comme un manque de respect, à l'origine d'un problème de communication. Comment établir une confiance mutuelle dans ces conditions ?

La cheffe a ensuite demandé si la troupe pouvait se doucher à notre camp. Nous avons donné notre accord, mais avant dix-sept heures, puisque nous devions nous-mêmes nous doucher ensuite. La troupe a largement dépassé l'horaire indiqué, au mépris de ses engagements. Mon équipe et moi-même travaillions au camp dans des conditions très pénibles et tenions beaucoup à pouvoir nous laver.

En plus de ce manque de respect, la cheffe de troupe est venue prendre sa douche à côté de moi, me demandant si j'accepterais de lui vendre un quad. Elle a ainsi porté le comble à son manque de respect, par une tentative de corruption d'un employé légal s'efforçant d'effectuer son travail honnêtement. La troupe manquait d'informations, alors qu'il lui aurait été facile d'en obtenir. Le prix de son déplacement en pleine forêt, deux jours durant, correspond à un gaspillage des ressources.

Les légionnaires nous ont demandé où nous pensions que se cachaient les clandestins. Nous leur avons répondu à l'ouest, le secteur est ayant déjà été ratissé par les FAG. Ils sont malgré tout repartis vers l'est. Le lendemain soir, je les ai croisés à la base vie de Saint-Elie en allant m'y ravitailler. Ils m'ont informé qu'ils n'avaient rien trouvé.

Le bilan de leur opération, d'une nullité stratégique absolue, m'a fait perdre toute confiance en les FAG. J'ai récemment dialogué avec un collègue employé par Reunion Gold sur le site de Boulanger, qui m'a rapporté une confrontation du même ordre. Les FAG sont arrivées sur son chantier, à l'ouverture pourtant signalée à l'administration, en croyant avoir affaire à des clandestins.

Si les légionnaires que j'ai croisés à Pedral s'étaient adressés à ma direction, nous leur aurions signalé l'existence de la piste que nous venions d'ouvrir, leur évitant ainsi une marche pénible en forêt. Avant de modifier les lois, il faudrait établir une meilleure collaboration entre les FAG et les acteurs miniers légaux, pleins de bonne volonté. La présence des FAG auprès de nos sites les sécurise et confirme notre légitimité à pratiquer une activité minière.

J'espère que les travaux de votre commission porteront leurs fruits et contribueront à la préservation du magnifique environnement que constitue la forêt amazonienne.

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