Intervention de Barbara Pompili

Réunion du mardi 25 mai 2021 à 18h30
Commission d'enquête sur la lutte contre l'orpaillage illégal en guyane

Barbara Pompili, ministre :

J'ai bien conscience de l'ampleur du problème et de la frustration que nous pouvons ressentir collectivement de ne pas réussir à éradiquer ce fléau. Néanmoins, il faut replacer les propos du président Chirac dans leur contexte : lorsqu'il a prononcé ces mots, la force Harpie n'avait pas été créée. Depuis, nous avons pu constater ce que l'on pouvait faire – qui n'est pas négligeable –, mais aussi les limites de ce qui est faisable.

Entre 2018 et 2020, 1 774 chantiers ont été détruits et 75 millions d'euros d'avoirs criminels ont été saisis, soit une moyenne de 25 millions d'euros par an, dont 13,5 kilos d'or. Par ailleurs, 180 personnes ont été placées en garde à vue et 99 personnes ont été condamnées. En 2020, un peu plus de 317 000 litres de carburant, 256 kilos de mercure et 182 tonnes de nourriture ont été saisis. La même année, 4 131 carbets ont été détruits. Bien sûr, trop de sites illégaux restent actifs dans le PAG, mais les résultats de la première campagne 2021 de survols aériens montrent une légère baisse de ce nombre, qui est passé de 156 en août 2020 à 148 en janvier 2021.

Du travail est donc accompli. Certes, c'est un peu le rocher de Sisyphe, puisque l'orpaillage illégal se poursuit. Aussi réfléchissons-nous à un volet supplémentaire dans la lutte contre cette activité, qui consisterait à sanctionner le transport de matériel vers les sites illégaux par fleuve et par pirogue. Cela permettrait d'assécher un peu ces chantiers en fournitures, mais aussi de traiter le sujet en amont plutôt que sur les sites où règne parfois, vous l'avez dit, une violence extrême. Un travail est en cours avec la chancellerie à ce sujet, afin d'intégrer la sanction du transport de matériel vers les sites illégaux dans le projet de loi « climat et résilience ». Ce texte prévoit déjà d'aggraver les sanctions pénales et de faire commencer les gardes à vue au moment où les orpailleurs arrivent à l'endroit où ils seront interrogés. Cela permettra d'améliorer l'efficacité de la réponse pénale et d'appliquer plus facilement les sanctions.

S'agissant de la remise en état des lieux dégradés par l'orpaillage illégal, une identification des sites où une tentative de restauration serait pertinente est en cours au sein du PAG. Il s'agit notamment de s'assurer que les orpailleurs ne risquent pas de revenir et de cibler les parcours techniques envisageables, en tenant compte tant des expériences déjà menées par ailleurs que de l'état de l'art en la matière. La première étape sera celle de l'expérimentation. Si les conditions le permettent, le PAG envisage également d'engager une opération de restauration à valeur de vitrine, orientée vers un retour à la meilleure naturalité possible, donc sans usage économique. Ce laboratoire expérimental de restauration pourrait également servir à l'évaluation du coût technique de la restauration et du préjudice environnemental potentiellement utilisable sur le plan judiciaire, dans le cadre de procédures engagées contre des personnes solvables. L'objectif est d'expérimenter la restauration et la revégétalisation d'ici fin 2021 dans des sites pilotes, pour un déploiement à plus grande échelle à compter de 2022. Les besoins financiers pour cette expérimentation sont évalués à un million d'euros pour les 40 hectares de sites pilotes, soit un coût moyen de 25 000 euros par hectare. Doit également être envisagée la reprise d'un secteur illégal dégradé par un opérateur légal, qui peut permettre, en fin d'exploitation, la réhabilitation et la revégétalisation du site. Là encore, des études sont en cours.

Bien que la réforme du code minier soit prévue dans le projet de loi « climat et résilience », je serai très attentive aux préconisations de votre commission d'enquête. Nous verrons s'il peut y être donné suite pour améliorer la lutte contre l'orpaillage illégal.

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