Intervention de Christophe Millescamps

Réunion du jeudi 16 septembre 2021 à 8h40
Commission d'enquête sur les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française

Christophe Millescamps, directeur de l'École nationale d'administration pénitentiaire (ENAP) :

Oui. Les élèves surveillants bénéficient désormais d'une sensibilisation au renseignement pénitentiaire d'une heure trente. La formation initiale comprend : eux heures de formation au principe de laïcité ; trois heures de formation aux religions ; deux heures de formation à la pratique des cultes.

S'y ajoutent des travaux dirigés de deux heures par groupe, portant sur l'utilisation de l'outil de repérage des signes de radicalisation violente. L'idée est de renforcer la participation des surveillants aux observations. Dans ce contexte, une grille dédiée au repérage des signes de radicalisation a été élaborée.

Depuis le début de l'année 2019, l'ENAP dispose d'un département de formation au renseignement pénitentiaire. La dernière formation dispensée était une formation d'officier traitant. Ainsi, le renseignement pénitentiaire est désormais assuré par un service à compétences nationales. Indépendant de la chaîne hiérarchique, il appartient au deuxième cercle de la communauté du renseignement et s'appuie sur une organisation propre, qui repose sur : le CNAPR, Centre national d'assistance et de prévention de la radicalisation ; des cellules interrégionales dédiées au renseignement pénitentiaire ; des délégués locaux au renseignement pénitentiaire présents dans chaque établissement ; des officiers traitants, chargés de rechercher des sources de renseignement.

Bien évidemment, il reste encore beaucoup de travail à accomplir. Il n'en demeure pas moins que des progrès importants ont été réalisés. Ainsi, nous travaillons beaucoup avec le renseignement intérieur et les services de gendarmerie, qui nous font profiter de leur savoir-faire, dans la formation des officiers traitants notamment.

En complément, il est indispensable de penser en permanence au deuxième volet de la mission. La population carcérale n'est pas, dans sa majorité, concernée par des problèmes de radicalisation. Elle se compose pour l'essentiel de personnes appelées à réintégrer la société. À ce titre, il est nécessaire de s'occuper du sujet de la récidive.

En pratique, l'administration parvient à traiter correctement la question de la radicalisation, dès lors qu'elle se met en capacité de produire un contre-discours. Lorsqu'un détenu s'engage dans la voie de la radicalisation, il est primordial qu'il puisse être confronté à quelqu'un qui l'en dissuade.

La surpopulation carcérale constitue, sur ce plan, un risque, puisqu'elle nous empêche d'être maîtres du contre-discours et de l'acculturation qui peut intervenir. Les stratégies de radicalisation en prison, de plus, ne sont pas nécessairement liées à une adhésion religieuse : elles peuvent obéir à une logique de protection, mais également à une logique dite « d'affaires ». Aux États-Unis ainsi, les prisons sont organisées par ethnies ou identités religieuses, dans une logique de protection, d'organisation et de contre-pouvoir. Les prisons françaises n'en sont pas encore là mais, si les problèmes de surpopulation perduraient toutefois, cela pourrait, à terme, constituer une vraie menace.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.