Intervention de François Jean

Réunion du jeudi 23 septembre 2021 à 10h10
Commission d'enquête sur les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française

François Jean, secrétaire général adjoint du Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire FSU (SNEPAP FSU) :

Le SNEPAP FSU se félicite que soient consultées les organisations syndicales de notre administration.

La surpopulation carcérale, les conditions de détention indécentes, les conditions de travail peu propices à une intervention quantitative pour l'ensemble des personnels pénitentiaires ne permettent pas un travail de qualité sur la prévention de la récidive. La surpopulation entraîne de facto la dégradation des conditions de détention : promiscuité, offres de travail, de formation, d'activité déjà sous-dimensionnées par la capacité théorique de l'établissement. Les personnels pénitentiaires, dans l'encadrement au quotidien des détenus et dans l'accompagnement et la préparation à la sortie, sont dans l'impossibilité numérique et temporelle de répondre à toutes les demandes.

Cette dégradation, au-delà de l'impact sur l'efficacité des prises en charge proposées, peut nourrir chez certaines personnes détenues et leur famille un sentiment d'incompréhension, voire de colère vis-à-vis du système carcéral, judiciaire et de la société dans son ensemble. Ce sentiment est le terreau propice à tout phénomène de radicalisation violente.

Pour cela, les solutions existent, comme le respect de l'encellulement individuel. Nous dénonçons les moratoires sans cesse renouvelés pour détourner le principe de l'encellulement individuel. Nous nous opposons à la remise en cause de l'encellulement individuel par l'utilisation faussée d'exemples étrangers. L'Espagne a mis en place un régime Respecto éprouvé et généralisé qui fait effectivement que les détenus utilisent leur cellule pour dormir. Ce n'est absolument pas le cas en France, où les régimes Respect sont encore à l'état de projet, absolument pas généralisés à l'ensemble des quartiers des établissements. L'encellulement individuel est inscrit dans la loi et elle est le pendant du respect de la dignité des personnes détenues. Il est grand temps de donner les moyens à l'administration pénitentiaire de le respecter.

Dans un premier temps, il convient de développer des aménagements ab initio, des sursis probatoires renforcés ou non et des libérations sous contrainte. Malgré des dispositions historiques de régulation mises en place dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire et l'application de la LPJ – la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice –, les taux d'occupation des maisons d'arrêt ont de nouveau largement dépassé les 100 %.

Il convient de créer de nouvelles places pour remplacer des établissements vétustes à proximité des voies de communication, des lieux habituels de résidence des PPSMJ – personnes placées sous main de justice –, des bassins d'emplois pour favoriser les liens avec l'extérieur, le travail, la formation, les activités, l'intervention du droit commun.

Il convient de développer des établissements adaptés à l'accompagnement des personnes détenues à la préparation à la sortie, orientés vers l'extérieur et proches des bassins d'emplois.

Concernant la surpopulation carcérale et la réponse pénale, le SNEPAP FSU est contre le cycle infernal de créations de places supplémentaires comme réponse unique à l'inflation carcérale. Pour cela, d'autres solutions existent : l'application du numerus clausus pour chaque établissement, à l'instar des établissements pour peines, où chaque nouvelle incarcération ne devrait être rendue possible que par la sortie d'une personne détenue ; l'automaticité des aménagements de peine, toute peine d'emprisonnement devant donner lieu à une libération anticipée d'office dans un système global de refonte et de système des peines ; la suppression des crédits de réduction de peine, pour rendre son terme fixe et permettre la réappropriation du temps de la peine par les condamnés ; la révision de l'échelle et des quantums de peines en conséquence.

Concernant la révision de l'échelle des peines, le SNEPAP FSU dénonce la tendance des dernières années à la « surpénalisation ». Il milite pour une justice équitable et non discriminatoire. En conséquence, il revendique une réflexion et un travail rigoureux sur la dépénalisation de certains délits et/ou de certaines procédures et demande la révision de l'échelle des peines. En effet, l'encombrement des services judiciaires sert régulièrement de prétexte pour justifier le recours à de nouvelles procédures ou de nouvelles dispositions, sans qu'aucune réflexion n'ait été menée sur l'évolution de la société, sur ce qui devrait relever du judiciaire et du pénal. Le SNEPAP FSU pose comme principe que l'incarcération ne doit pas être la sanction de référence, mais l'ultime recours, et revendique qu'une réflexion soit menée afin que la peine d'emprisonnement soit exclue pour un certain nombre d'infractions. Le renforcement des mesures restrictives de liberté et la création d'une peine autonome de probation et la recherche.

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