Intervention de Olivier Corzani

Réunion du jeudi 7 octobre 2021 à 10h55
Commission d'enquête sur les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française

Olivier Corzani, maire de Fleury-Mérogis :

Je souhaite d'abord remercier la commission d'enquête pour son travail, qui vise à prendre en compte la dimension territoriale et locale d'un ministère d'État, ce qui n'est pas chose habituelle. L'exercice entamé aujourd'hui est à la fois inédit et audacieux. Je suis convaincu qu'il sera mutuellement profitable et que de nombreux ministères devraient s'inspirer de ce travail. Je vais m'efforcer de tenir un discours constructif mais de vérité.

Installer une prison n'est jamais anodin, au regard des caractéristiques particulières que cela implique, mais également de l'imaginaire collectif, traversé par une longue histoire autour de cette thématique. Fleury-Mérogis, à ce titre, en présentes toutes les caractéristiques, mais de façon exagérée. Il s'agit de la plus grande maison d'arrêt d'Europe, qui deviendra bientôt un centre pénitentiaire. Elle abrite actuellement plus de 3 600 détenus répartis dans un centre de jeunes détenus, une maison d'arrêt des hommes et une maison d'arrêt des femmes. Ces détenus sont encadrés par près 2 600 agents, dont plus de 900 habitent la commune. Une grande partie de ces agents sont issus de l'outre-mer. Beaucoup vivent Fleury-Mérogis comme un passage vers une mutation leur permettant de repartir outre-mer.

Cette situation entraîne chaque année une rotation démographique importante. Entre juin à septembre, nous comptons environ une centaine de familles qui quittent la ville pour autant d'arrivées dans la période. Ces salariés arrivent généralement jeunes et seuls, et repartent souvent en couple avec des enfants, ce qui implique pour la ville un renouvellement constant des publics de jeunes enfants et de scolaires, et donc une demande dédiée aux enfants de 0 à 12 ans sans cesse renouvelée. Le vieillissement de la population observable dans les autres communes n'existe pas chez nous. L'ensemble de l'espace foncier qui couvre les logements hébergeant les agents, le complexe maison d'arrêt ainsi que le gymnase, le terrain de football, le pôle de retrait et d'extraction judiciaire, l'ancien couvent, etc., sont la propriété du ministère de la justice, ce qui représente quasiment les trois quarts du territoire administratif de la commune. Du fait de leurs horaires décalés, les agents sont naturellement très demandeurs de services publics ouverts sur des plages horaires très larges. Pour vous donner une idée de ce que ça implique, nous disposons d'une crèche dont les horaires s'étalent de six heures trente à dix-neuf heures trente. Dans cette crèche, dix places sont réservées aux agents du ministère de la justice, avec un appui financier de sa part. Nous réfléchissons également à une seconde structure au champ horaire élargi. Le centre de loisirs est ouvert de sept heures quinze à dix-neuf heures trente, et c'est encore insuffisant au regard des demandes des personnels.

Pour compenser ces impacts, la population carcérale est comptabilisée dans la population communale, ce qui a pour effet d'augmenter la DGF – dotation globale de fonctionnement – attribuée à la commune. Le supplément a été évalué, approximativement en fonction des années, autour de 350 millions d'euros, ce qui ne permet pas d'assouvir l'ensemble des besoins exprimés. Mais nous avons su instaurer au fil du temps de nombreux partenariats, par exemple à travers la création d'une micro-crèche dans la maison d'arrêt des femmes, à destination des femmes détenues, à travers la solidarité que nous nous sommes témoignés mutuellement dans la gestion de la pandémie, l'échange culturel que nous entamons avec la maison d'arrêt, ou encore la mise à disposition de l'offre de soins municipale.

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