La société Hesion est installée dans les Yvelines. Avec une trentaine de personnes, nous développons des solutions numériques pour optimiser le fonctionnement des parkings. Nous travaillons également à la mise en sécurité des systèmes de chaufferie dans les bâtiments tertiaires. Pour cette dernière activité, nous avons confié la fabrication de systèmes à la maison centrale de Poissy.
Travailler de la sorte m'a permis de découvrir la prison et de la faire découvrir dans mon entreprise. Pas un seul de mes collaborateurs n'avait entendu parler de ce qu'était la prison. J'ai donc ouvert des consciences sur ce sujet. Par ailleurs, toutes nos solutions sont fabriquées à l'intérieur de la prison : quand elles sortent, elles sont vendues au client. Pour cette raison, nous avons reçu le label PEPs, « Produit en Prison ».
Nous avons intégré deux détenus dans l'entreprise, même s'ils ne sortent pas puisqu'ils font l'objet d'une très longue peine. Ce sentiment d'appartenance à l'entreprise joue également dans leur état d'esprit. Nous avons recruté ces personnes, qui n'avaient ni formation ni compétence en lien avec notre activité : nous nous en sommes occupés comme des apprentis, malgré leur âge, 59 ans et 60 ans. Le seul enjeu pour eux est de retrouver une forme de dignité. Au-delà de la dignité au travail, l'essentiel pour moi est la dignité de la personne : mener une activité complexe les conduit à rentrer dans un sujet avec difficulté et à prendre conscience de ce qu'est l'effort. Nous les soutenons dans leur apprentissage de ce véritable métier. Nous constatons leurs progrès, réguliers. Au départ, nous ne leur avons donné aucun objectif, ce qui aurait été contre-productif. L'essentiel était qu'ils montent en compétence jour après jour. Nous les avons augmentés une fois que ces progrès ont été réalisés.
Notre réalisation constitue un véritable succès. Même si ces détenus sortiront de prison dans longtemps, nous contribuons à les réinsérer dans leur univers actuel. Aux dires de la directrice de la prison, ils se sont largement stabilisés et se sentent faire partie d'une communauté : celle de l'entreprise. Nous leur confions une activité qui fait travailler les mains et l'esprit.
Il ne faut pas en rester à l'idée que ces personnes ne savent rien faire et n'ont pas de compétence : il faut tenter quelque chose. Ces personnes n'ont certes pas fait d'études, mais il est possible de faire entrer des compétences par la pratique, davantage que par les études.