Intervention de Matthieu Quinquis

Réunion du jeudi 21 octobre 2021 à 16h00
Commission d'enquête sur les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française

Matthieu Quinquis, membre du bureau de l'Association des avocats pour la défense des droits des détenus (A3D) :

Je rejoins les propos de Mme Marion Moulin concernant le choix de l'encellulement individuel. Par ailleurs, la pratique pénitentiaire actuelle constitue une entrave à l'augmentation du nombre d'heures d'activité en dehors de la cellule. Le régime des portes fermées suppose un nombre de mouvements importants pour les personnels pénitentiaires qui devient rapidement ingérable. Les bâtiments sont sous-adaptés et ne proposent pas d'espaces d'activités individuelles ou collectives. De nombreux éléments pratiques doivent évoluer dans le quotidien des coursives.

La régulation carcérale demeure un impératif. Dans le cadre de cette commission, vous avez visité la prison des Baumettes. J'ai lu le rapport de la CGLPL qui a visité cet établissement récemment. Un paragraphe indique que le tribunal judiciaire de Marseille a mis en place un outil de régulation. Je ne connais pas précisément son mode de fonctionnement. Peut-être en avez-vous connaissance. Je vous invite à lire ce rapport.

Vous avez une haute estime de l'influence dont peut disposer un avocat quant à la peine prononcée. Dans la pratique, je serais plus nuancé. Nous devons tendre vers cet objectif en invitant les avocats à saisir l'application des peines non seulement pour l'aménagement, mais aussi pour le jugement, afin d'exposer aux juridictions le panel de mesures envisageables. La loi prévoit suffisamment d'alternatives aujourd'hui. Or ces dernières sont davantage utilisées pour resserrer le filet pénal que comme mesures de substitution à la prison. Nous savons que plaider un TIG en comparution immédiate est illusoire, la procédure de comparution immédiate visant à incarcérer plus rapidement. Une réflexion doit être menée sur la limitation de ces procédures d'incarcérations massives et rapides, car tant qu'elles pourront être utilisées facilement par les parquets, ce flux entrant de personnes détenues continuera.

Dans le questionnaire, vous posez la question du retour. Nous avions, en avril dernier, pu échanger avec Mme Caroline Abadie sur ce point. Comme le suggère M. Jean Caël, il est nécessaire de transformer ces voies de recours. Un mécanisme de régulation obligatoire permettrait de limiter le recours à l'incarcération et faciliterait les sorties par la voie d'aménagement de peines. Il s'agit d'ailleurs des recommandations du comité des ministres du Conseil de l'Europe dans sa décision d'exécution de l'arrêt J.M.B. et autre contre France du 16 septembre dernier : ce dernier confirme la nécessité d'envisager des mesures législatives qui réguleraient de manière plus contraignante la population carcérale en France. Par ailleurs, ce rapport reprend l'ensemble de nos inquiétudes sur l'article 803-8 du code de procédure pénale.

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