Cette question relève d'une réflexion autour de la visibilité de notre action. Nous sommes convaincus qu'il est nécessaire de nous diriger vers une simplification des réponses pénales, en ne proposant que trois types de peines : l'amende, la peine de probation et la peine de prison. Chacune de ces peines pourrait être assortie d'un sursis. De cette façon, le fait qu'une peine peut se purger ailleurs qu'en prison serait peut-être plus lisible. Dans l'idéal, ce système devrait également prévoir le temps nécessaire après le prononcé de la peine pour évaluer les besoins et les risques que présente la personne condamnée, afin de proposer un contenu qui serait ensuite validé par l'autorité judiciaire. La peine de probation pourrait consister à réaliser du travail d'intérêt général – TIG – et être soumise à une surveillance électronique sans doute appelée « assignation probatoire ». En effet, le nom des peines a souvent une incidence sur la façon dont elles sont prononcées. On pourrait imaginer du sursis probatoire, du sursis probatoire renforcé, une prise en charge collective, individuelle.
Nous nous appuierions bien sûr sur l'évaluation que nous sommes en mesure de réaliser pour déterminer les conditions de prise en charge. Les personnels sont aujourd'hui formés à l'évaluation, et ces dernières années ont démontré que les CPIP sont tout à fait à même de déterminer quels partenariats actionner selon les situations. Si nous étions un service travaillant avec un secteur habilité, nous pourrions proposer différentes interventions avec nos divers partenaires dans le contenu de la peine après cette phase d'évaluation.
Nous savons que cette démarche a été initiée par la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. La création de la détention à domicile sous surveillance électronique – DDSE peine – témoigne d'une volonté d'affirmer que certaines peines peuvent être purgées à l'extérieur de la prison. Pourtant, la DDSE peine est très peu prononcée, ce qui prouve que cette idée a du mal à prendre sa place. Comment se fait-il que les lois aient tant de mal à s'appliquer ? Il existe sans doute des explications. Peut-être les magistrats ont-ils encore besoin de s'habituer à la prononcer, et les avocats à la plaider. L'appellation « DDSE » ne constituait peut-être pas le meilleur choix car c'est également le nom de l'aménagement de peine sous surveillance électronique, ce qui a généré une grande confusion. En effet, depuis que ces deux peines existent, il ne se passe pas une semaine sans qu'elles soient confondues.
Par ailleurs, la mise en œuvre de la LPJ à quelques jours du démarrage de la crise sanitaire et du premier confinement n'a sans doute pas permis à tous les personnels concernés de se lancer dans son application. Il s'agissait d'une période où nous nous réunissions pour y réfléchir. Je pense notamment au département de l'Isère, où les magistrats, le SPIP, et les établissements pénitentiaires cherchaient à trouver le public adapté à cette nouvelle peine. L'arrivée de la crise sanitaire a mis un frein à toute cette phase de réflexion, même si nous avons pu la poursuivre un petit peu grâce aux outils de réunion à distance. Toutefois, nous n'avons pas pu aller au bout.
Nous nous demandons si la DDSE peine est en train de prendre le même chemin que la contrainte pénale, précédente peine de probation. Nous serions les premiers à regretter que la seule peine identifiée comme étant détachée de la prison n'arrive pas à être appliquée. Souvent, une question revient quant à ces peines alternatives : comment sont-elles sanctionnées si elles ne fonctionnent pas ? Il s'agit là d'un véritable paradoxe. En effet, on ne se pose jamais cette question au sujet de la prison. Il reste beaucoup de travail sur ces questions.