Intervention de David Clavière

Réunion du mercredi 20 novembre 2019 à 14h40
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

David Clavière, préfet, directeur du cabinet du préfet de police :

La chaîne hiérarchique est assez simple. Le directeur de cabinet du préfet de police est le numéro deux de la préfecture de police. S'agissant d'un adjoint de catégorie C, agent administratif au sein d'une direction de la préfecture de police, il y a de nombreux échelons entre le directeur de cabinet du préfet de police et cet agent. Cela me permet de préciser que je ne connaissais pas Mickaël Harpon, ni n'avais eu de connaissance d'un signalement, qu'il soit écrit ou oral, le concernant. Ce n'est évidemment qu'au moment où l'attentat a été commis dans un premier temps, puis, de manière plus détaillée, lorsque la directrice du renseignement, Mme Bilancini, a adressé au ministre de l'Intérieur, sous couvert du préfet de police, un rapport que j'ai naturellement eu en main, que j'ai eu connaissance, à la fois de l'existence de Mickaël Harpon et des propos qu'il avait tenus qui, selon les termes de Mme Bilancini, auraient provoqué une querelle – une vive querelle, dit-elle –, au sein du service où il était affecté.

S'agissant des alertes, ou du manque d'alerte, et de l'appréciation que j'en ai, on peut dire en effet qu'il y a une faille. Je fais mien ce terme… Pourquoi ce signalement n'est-il pas remonté ? L'enquête nous le dira. Je n'ai pas d'autres éléments que ceux que Mme Bilancini a couchés sur le papier, et je n'ai pas de raison de croire qu'il en fut autrement.

Je peux ajouter un élément. Si vous avez regardé mon curriculum vitae, vous savez sans doute, que j'ai été directeur des ressources humaines à la préfecture de police, avant d'être nommé d'abord préfet délégué à la sécurité dans le Rhône, puis directeur de cabinet du préfet de police. Cette question de la radicalisation à la fois en externe et en interne était prise en compte. On ne peut pas dire que ça n'était pas le cas avant le 3 octobre. J'en veux pour preuve que j'ai eu à connaître, lorsque j'étais directeur des ressources humaines, des cas de radicalisation. Et que j'ai moi-même présidé – je tenais à le faire –, les conseils de discipline qui concernaient des agents pour lesquels avait été fait un signalement relatif à des comportements de radicalisation. Sur les cinq révocations qui ont été prononcées, j'ai présidé au moins trois conseils de discipline, et au moins un conseil de discipline qui a conduit à la fin de contrat d'un adjoint de sécurité. Et tout cela, bien avant le 3 octobre…

Je confirme ce qu'a dit devant vous notamment M. Michel Delpuech, préfet de police de 2017 au 20 mars 2019 : c'est que non seulement les signalements existaient en matière de radicalisation, mais aussi qu'ils étaient traités. Et ils l'étaient selon les procédures en vigueur, c'est-à-dire que lorsqu'il y avait des éléments suffisants, il était procédé à une enquête administrative, puis un conseil de discipline était réuni. Je veux souligner que, selon moi, il n'y a pas spécialement d'inhibition de la part des policiers ni de leur hiérarchie sur ces sujets. Quand j'étais directeur des ressources humaines, je m'employais à avoir avec mes collègues directeurs et sous-directeurs, notamment ceux qui étaient chargés des ressources humaines ou des moyens dans les directions, des moments informels. Bien sûr, à la préfecture de police, tout est très hiérarchisé – et il le faut dans un ensemble aussi divers –, mais en tant que directeur des ressources humaines, je m'employais à avoir des réunions où tout pouvait être évoqué. Et quand je mets en parallèle la création de ces conditions d'un dialogue ouvert avec le fait qu'il ne pouvait pas être ignoré, au moins de l'encadrement supérieur, que des signalements existaient et qu'ils étaient traités, je ne crois pas qu'il y avait d'inhibition. Évidemment, je parle de signalement par écrit, par définition, puisque pour le transformer en enquête, puis en procédure disciplinaire, il faut que le signalement soit écrit. Je veux bien croire que l'inhibition puisse exister en certains endroits – je ne peux pas généraliser –, mais pas au sein de l'encadrement supérieur.

Dès lors, je lis ce que dit Mme Bilancini, et tout porte à croire qu'effectivement il n'y a pas eu de signalement ; l'information est restée au niveau de la cellule informatique dans laquelle était affecté Mickaël Harpon. L'enquête judiciaire en dira plus.

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