Intervention de Michel Cadot

Réunion du mercredi 20 novembre 2019 à 16h05
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

Michel Cadot, préfet de police :

. Je vous remercie pour la clarté de votre question. Ce modèle est imaginable mais je ne crois pas, au travers de mon expérience de préfet de police, qu'il serait plus efficace. Il suppose le regroupement du service central du renseignement territorial, de la DGSI, de la DGPN, des sources d'information et de renseignement de la gendarmerie nationale, de la direction centrale de la police judiciaire dans un même service de renseignement. Cela ferait remonter la totalité des informations, les signaux faibles comme les signaux lourds présentant un risque élevé et justifiant une confidentialité et un suivi plus importants vers un même centre de renseignement. En France, nous considérons parfois l'unité comme un gage d'efficacité, mais la vérité oblige à constater que pour coordonner ces différentes sources de renseignement au niveau central, les ministres, en particulier dès 2015, ont été amenés à créer des structures, comme la coordination nationale du renseignement, avec un préfet nommé à sa tête, en plus d'une autre qui existait antérieurement. Une réunion hebdomadaire présidée par le ministre est destinée à faire remonter les informations de toutes ces directions sur les dossiers les plus sensibles, ce qui était très utile et très bienvenu. Ce travail est réalisé, dans une zone à très forts enjeux sécuritaires, au sein de la préfecture de police, sous le contrôle d'un préfet de police, de son cabinet et des directeurs dans un système intégré à l'intérieur duquel la communication horizontale est facilitée.

Le risque de créer un esprit maison, évoqué par l'un de vos collègues, est indéniable. Il faut donc y parer par le choix des recrutements, la formation et une mobilité régulière, qui est d'ailleurs souhaitée par les agents eux-mêmes, qui n'ont aucune envie de faire toute leur carrière à la préfecture de police, s'ils peuvent effectuer des alternances ailleurs. Encore faut-il offrir des postes de nature à rendre le déroulement de carrière utile et attractif. Mais cette mise en commun est, à mon sens, un système optimal, compte tenu de l'importance du territoire et de sa particularité, sous réserve de la garantie et du contrôle d'un réel partage interne à la préfecture de police entre les différentes directions territoriales chargées du renseignement et de la police judiciaire et les niveaux centraux, qui doivent recevoir la totalité des informations. En outre, des règles claires de partage des dossiers doivent être établies, entre ceux relevant du niveau central et ceux qu'il délègue puisque, vous le savez, la DRPP n'est pas du tout indépendante. Elle ne l'était pas en 2015, elle ne l'était pas avant non plus, mais elle s'inscrivait dans un schéma de partage hebdomadaire des dossiers lors de réunions à la DGSI, lesquelles ont été densifiées. Il y avait aussi des réunions à la préfecture de police, autour du préfet de police, chaque semaine.

Le schéma que vous suggérez est possible mais je ne suis pas persuadé qu'il serait le mieux adapté à une agglomération dense, à l'urbanisation continue, constituant un bassin unique de vie, de logement et d'emploi. Les personnes ne peuvent pas être traitées à l'échelle du seul département, parce que, vous l'avez relevé, il faut obtenir des renseignements aussi bien sur les lieux de logement ou de travail que de culte, de sport ou autres… Les renseignements émanant des bailleurs sociaux et d'autres acteurs territoriaux méritent d'être mis en commun, puis triés pour faire remonter vers la DGSI les cas relevant réellement d'une action lourde et pour confier à la DRPP ce qui relève d'une action pilotée en bonne harmonie, traiter enfin sur le plan territorial ce qui constitue des signaux plus faibles et demande une surveillance continue et régulière. À cet égard, je précise que nous avons organisé, dès après les attentats du Bataclan, une réunion tous les quinze jours avec l'ensemble des services, y compris la DGSI et le parquet, afin d'examiner tous les cas signalés et recensés dans les quatre départements de Paris et de la petite couronne. Ce travail de coordination du renseignement avec la DRPP, la DGSI, le SCRT était fait auparavant, mais son suivi est désormais plus efficace car plus proche de la réalité complexe du phénomène de radicalisation qui n'est pas uniforme.

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