Intervention de Nicolas Lerner

Réunion du mercredi 11 décembre 2019 à 15h30
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de paris le jeudi 3 octobre

Nicolas Lerner, directeur général de la sécurité intérieure :

En effet, le ministre de l'Intérieur a évoqué une faille et le secrétaire d'État un dysfonctionnement. Je ne me permets pas de reprendre à mon compte ces formules des autorités ministérielles mais pourquoi en est-on arrivé là ?

Il est absolument nécessaire que, dans le cadre de l'acculturation permanente – qui doit être aussi bien celle des agents des services de police –, nous puissions nous appuyer sur des procédures, des inspections générales propres à chaque structure dont le métier consiste précisément à évaluer la menace.

Je me demande si ces procédures, ces portes d'entrée, ces bons interlocuteurs étaient connus de l'ensemble des agents de la DRPP. Seul point de comparaison dont je dispose : la DGSI, où l'inspection générale propre à cette maison est clairement identifiée, a l'habitude d'être saisie et de travailler discrètement. Nous considérons à la DGSI qu'un signalement oral vaut signalement et nous n'attendons pas nécessairement un rapport écrit pour commencer des investigations. Nous disposons d'une série de canaux de saisine interne garantissant l'anonymat des personnels. Je ne connais pas suffisamment la DRPP pour savoir si l'ensemble de ses agents connait ces procédures mais je pose la question. Il est très important que l'ensemble des agents d'une structure ait en tête les circuits de signalement qui peuvent les amener à porter une information à la connaissance de l'instance d'inspection et que ces circuits, de plus, puissent garantir parfaitement l'anonymat du signalement. C'est donc le cas à la DGSI et je ne sais pas s'il en était de même à la DRPP mais il est très important qu'il en soit ainsi dans l'ensemble des structures et services de renseignement.

En matière d'instruction des dossiers d'habilitation, la DGSI dispose d'une double compétence.

Tout d'abord, l'inspection générale de la sécurité intérieure a pour mission de traiter des procédures d'habilitation de l'ensemble des agents de la DGSI. Une autre structure de la direction générale est quant à elle chargée de l'instruction des dossiers de l'ensemble des agents de l'État qui ont vocation à être habilités à un titre ou à un autre – secret, très secret ou confidentiel défense. Les sphères « agents de la DGSI » d'un côté, et « autres personnels civils », de l'autre, sont respectivement prises en compte par des structures différentes au sein de la DGSI. Une seule exception pour la sphère « autres personnels civils », à laquelle vous avez fait allusion : les agents fonctionnaires de la préfecture de police, en application d'un protocole que j'ai moi-même signé en février 2019, quelques mois après ma prise de fonction.

Au terme d'une réflexion qui avait commencé plusieurs mois avant, pourquoi l'ai-je fait ? C'est notre conviction, ma conviction – qui demeure –, selon quoi les modalités de traitement d'instructions de ces procédures d'habilitation par la DRPP pour le compte de ses personnels ou celui de la préfecture de police ont atteint un standard équivalent à celui de la DGSI. Cette conviction repose sur un travail qui a duré quasiment deux ans, postérieur à la nomination de Françoise Bilancini, dont vous savez qu'elle est issue de la DGSI où elle était sous-directrice chargée des moyens. Elle dispose donc d'une parfaite culture et connaissance de ses standards. Elle s'est astreinte à reproduire ces procédures, à renforcer la structure chargée des habilitations, à systématiser les entretiens préalables – ce n'était pas le cas alors que cela semble un minimum lors de l'habilitation d'un agent du renseignement, et c'est au regard de ces standards et de ces appréciations que j'ai été amené à signer ce protocole.

En l'occurrence, la question se pose de sa pérennité, de même que celle de cette organisation. L'une des questions posées à l'inspection des services de renseignement concernait précisément ce protocole mais peut-être est-il encore trop tôt pour tirer des enseignements formels ou vous annoncer une décision. Je suis en tout cas convaincu, à titre personnel, que nous devrons revenir sur ce protocole et c'est la proposition que je formulerai à l'autorité administrative. Je ne remets pas en cause la qualité du travail effectué par la préfecture de police mais pour des raisons juridiques et en raison de ce précédent, je suis convaincu qu'il faut le revoir et ré-internaliser le traitement de ces procédures au sein de la DGSI.

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